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Religion : Foi en l'avenir

Dans l'église Saint-Sulpice, à Paris. - Photo Olivier Dion

Religion : Foi en l'avenir

Malgré une année morose à cause de la crise sanitaire, les éditeurs du segment religieux ont mis les confinements à profit pour lancer de nouveaux chantiers éditoriaux ou numériques.

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Par Cécilia Lacour
Créé le 04.04.2021 à 11h02

Doublement pénalisés. Les éditeurs de religion n'ont pas seulement souffert de la fermeture des librairies pendant les confinements. Ils ont aussi subi la suspension des célébrations religieuses. « Les ventes de livres pour le christianisme sont rythmées par plusieurs événements comme les fêtes de la foi au printemps, pour lesquels des personnes viennent en librairie pour acheter des cadeaux pour les professions de foi ou les communions, et la rentrée de la catéchèse. Celle-ci a été perturbée, de nombreux lieux n'ont pas repris leurs cours dès le mois de septembre », explique Bruno Nougayrède, président du groupe Elidia et président du groupe Religion du Syndicat national de l'édition (SNE).

Par conséquent, Pierre-Yves Camiade, président du Syndicat des libraires de littérature religieuse (SLLR), relève un chiffre d'affaires en recul d'environ 20 % en 2020 par rapport à l'année précédente pour les librairies spécialisées. « Cela est essentiellement dû, non pas à une défection de notre clientèle privée qui s'est maintenue voire renforcée, mais à un marché institutionnel qui s'est atrophié », explique-t-il. Le libraire souligne également des disparités entre les librairies. « Des structures modestes mal outillées pour la vente en ligne ont plus souffert que les autres. Pendant le deuxième confinement, les librairies qui ont des sites Internet s'en sont très bien sorties. Pour elles, le chiffre d'affaires pour les mois de novembre et décembre cumulés est équivalent à celui de la même période en 2019 », souligne-t-il.

Même si la fin d'année a été plutôt bonne, les éditeurs interrogés annoncent logiquement un chiffre d'affaires en repli. Selon les données fournies par GfK, le segment affiche un important repli, à -20 % en volume et -18 % en valeur. Cette baisse est liée aux confinements, que le dynamisme de décembre n'a pas suffi à rattraper, mais aussi à un fort recul (-17 %) du nombre de nouveautés.

 

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Nouveaux projets

Les deux confinements ont toutefois permis aux éditeurs de mettre au point de nouveaux projets, qu'il s'agisse de développements internes ou d'innovation numérique. Régis de Villers, directeur général de Salvator, a mis le confinement de mars à profit pour se concentrer sur son « projet hors-norme et exceptionnel » : la publication en septembre de La Bible : traduction liturgique avec notes explicatives, coordonnée par Henri Delhougne. « Vendue à 9 000 exemplaires en trois mois, dont un mois de fermeture des librairies, et réimprimée avant la fin de l'année », cette Bible grand format vendue à 69 euros sera déclinée le 15 avril en deux versions plus compactes vendues à 49 et 39 euros. Albouraq a finalisé l'édition bilingue arabe-français du Coran (1er avril), traduite et commentée par le cheikh Si Hamza Boubakeur. Publiée par Fayard en 1972, la première exégèse en langue française était épuisée depuis 1995.

 

Certaines maisons ont peaufiné le lancement de collections. Les éditions du Cerf « ont commencé l'année avec une incursion en littérature », le 4 février, avec « Les sept péchés capitaux » pour laquelle le directeur général Jean-François Colosimo a « proposé à sept écrivains de plusieurs générations » de donner une illustration contemporaine de chaque péché. La maison inaugure le 6 mai « Re-trait », avec Passions de Jean-Claude Lavigne et La sainteté en ligne de mire de Patrick-Dominique Linck. Cette collection de méditation spirituelle offre « un temps de retraite personnalisé » avec des lectures, commentaires et exercices.

Après « Eloge spirituel de » lancée en juillet dernier, Artège développe en mai « Un regard chrétien sur », dirigée par le père Jean-Christophe Thibaut, avec un premier volume consacré à la sophrologie. Mame lance une collection d'essais « avec une identité graphique forte » pour « apporter un regard chrétien autour d'un thème d'actualité », annonce son directeur général Guillaume Arnaud. Elle est inaugurée avec Qui sauver ? L'homme ou le chien ? de Jacques Ricot (12 mars) et Jésus viendra-t-il aussi sauver les machines ? de Jean-Marc Moschetta (16 avril). Après « C'est quoi ? », Albouraq propose à la rentrée « C'est qui ? », une collection « destinée aux enfants entre 4 et 8 ans sur les prophètes et les grands personnages » de l'islam, annonce l'éditrice Fida Mansour.

Après une année morose, les éditeurs proposent des titres ambitieux pour 2021. Après avoir édité La bible des femmes en 2019 pour proposer « de nouvelles lectures et des analystes féministes sur le lien entre les textes bibliques et la représentation des femmes », Matthieu Mégevand, directeur de Labor et Fides, a publié en février Une bible, des hommes pour interroger le masculin et la masculinité dans la Bible. Directeur du domaine religieux chez Albin Michel, Jean Mouttapa donne le 31 mars la parole à Kahina Bahloul, première femme imam en France et fondatrice de la mosquée Fatima à Paris. Dans Mon islam, ma liberté, elle évoque son parcours et revendique un islam moderne et libéral. Au Seuil, Elsa Rosenberger mise sur La terre de demain : dialogues avec le pape François sur l'écologie intégrale du fondateur du mouvement « Slow Food » Carlo Petrini (25 mars). Fida Mansour souhaite « faire connaître l'islam de manière différente » avec Bouddha vu par un musulman de Samir Ismaili (Albouraq, 1er mars).

 

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Quête de sens

Ce début d'année met aussi le moine David-Marc d'Hamonville à l'honneur. Après sa traduction commentée de Jonas (Cerf, janvier 2021), il sort Désir : quelques mots d'un moine sur un sujet sensible (Salvator, 25 mars), un titre consacré à la dimension essentielle de l'humanité qu'est la sexualité. Albin Michel édite également Si tu veux la vie de David-Marc d'Hamonville (28 avril), une correspondance fictive dans laquelle le moine bénédictin déroule des conseils de vie directement inspirés de la règle de saint Benoît. à travers ce texte, il « donne un commentaire caché de la règle de Saint-Benoît. Chaque paragraphe commence par un mot ou une phrase de la règle », souligne Jean Mouttapa.

En cette période, « les lecteurs ont besoin d'entendre des voix qui nous donnent des messages d'espérance », assure Anne-Sophie Jouanneau, directrice éditoriale chez Bayard. L'éditrice propose Job est comme ça : lire le Livre de Job en temps de pandémie de Sylvain Gasser (10 mars) dans lequel l'auteur montre comment, dans les épreuves, l'homme peut parvenir à l'unification de son être. Elle publie aussi Demain au creux de nos mains de Magda Hollander-Lafon (17 mars), déportée à Auschwitz lorsqu'elle avait seize ans, et auteure de Quatre petits bouts de pain (Albin Michel, 2012 et réédité en poche par Le livre de poche deux ans plus tard). Après avoir témoigné devant près de 20000 enfants de son expérience de la Shoah, elle livre dans son nouvel ouvrage une méditation sur le sens de cette transmission qui ne doit pas, selon elle, être douloureuse pour l'autre mais au contraire insuffler de la vie.

Dans le même esprit, Labor et Fides éditent le 7 avril Jours de royaume de Marie-Laure Choplin dans sa collection « Petite bibliothèque de spiritualité », une réflexion sur le royaume de Dieu, envisagé comme prenant place à l'intérieur de chacun. « Les questionnements existentiels et la quête de sens sont hyperprésents dans la société mais elles vont l'être encore plus », prédit Matthieu Mégevand.

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