Avant-critique Récit de voyage

Olivier Rolin, "Vers les îles Éparses" (Verdier)

Olivier Rolin - Photo © JL Bertini

Olivier Rolin, "Vers les îles Éparses" (Verdier)

Rentrée littéraire

Parti vers les lointains, Olivier Rolin rejoint sa vérité d'écrivain et d'homme penché sur son crépuscule.

Parution 9 janvier

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Par Olivier Mony
Créé le 10.01.2025 à 09h00

Îles flottantes. Petites îles françaises de l'océan Indien situées vers Madagascar, les îles Éparses sont des confettis oubliés de l'empire colonial, surtout peuplées de plus de crabes, d'araignées et autres bestioles que d'hommes... C'est pourtant bien pour ravitailler ces derniers que, peu après la pandémie, Olivier Rolin a caboté durant plus d'un mois de l'une à l'autre, à bord du Champlain, fier navire de la Marine nationale. La présence de l'écrivain en ces lieux et sur cette embarcation n'était toutefois pas planifiée, pige en nature de la part d'un éditeur en contrepartie d'une préface donnée à une réédition de La guerre du Péloponnèse de Thucydide. Amateur depuis toujours (comme son frère, Jean) des horizons lointains de l'Histoire et de la géographie, Rolin n'eut pas besoin de se laisser convaincre...

Vers les îles Éparses qu'il publie aujourd'hui est donc la courte et enchanteresse relation de ce voyage. Ce que l'auteur y trouve ne ressort pas que du dépaysement, si puissant soit-il. Ce qui est épars ici, ce ne sont pas que ces îles, mais aussi les états d'âme de l'écrivain, dont la douce ironie mélancolique fait chaque fois mouche. « Ce n'est pas seulement vers les îles Éparses que je navigue, mais vers l'état déplorable, fragile et un peu ridicule, de vieux [...] : jamais encore (et sans qu'il y ait mauvaise intention de la part de mes compagnons de voyage) je n'ai éprouvé à ce point que je faisais désormais partie d'un autre monde. Habitué qu'on est à soi-même et à son apparence, on ne s'est pas vu se transformer en cet être de papier mâché en qui les autres, qui ne vous connaissent pas, identifient immédiatement un semi--vivant. L'océan Indien sera pour moi la mer de la Sénilité... » « Reste avec nous car le soir tombe » est-il dit dans l'Évangile. Olivier Rolin en prend donc le contrepied : il part. Avec quelques livres (Duby, Chateaubriand, Houellebecq, Queneau...), un carnet et un regard qui lui, est sans âge. Il note autant que la jeunesse de ses compagnons de voyage, leur bienveillance, leur équanimité. Plutôt que le soir, il préfère les matins du monde de la mer et de ces îles inviolées. On sent venir à lui quelque chose comme une réconciliation. Petit livre, grand texte.

Olivier Rolin
Vers les îles Éparses
Verdier
Tirage: 6 000 EX.
Prix: 17,50 € ; 96 p.
ISBN: 9782378562335

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