Le grand incendie. La tragédie, c'est ce qui arrive et c'est ce qui demeure. Exemple : le 5 août 1949, à Mann Gulch (Montana), un important incendie se déclare dans les montagnes. Une compagnie de quinze jeunes pompiers parachutistes (des smokejumpers, en VO) est envoyée sur place. Douze n'en reviendront pas. Le traumatisme dans les populations locales sera puissant, notamment pour un professeur de lettres à l'université de Chicago, ayant longtemps vécu non loin des lieux de la catastrophe et lui-même ancien pompier et agent forestier, Norman Maclean. Maclean vivra jusqu'à la fin de ses jours dans le souvenir et même l'obsession de cet incendie. Devenu sur le tard écrivain, il s'emploiera des années durant à rendre compte de la tragédie, de ses circonstances, de la vie et de la mort de ceux qui y succombèrent, dans un livre-monstre et bouleversant, La part du feu, qui ne sera publié que de manière posthume.

En France, il l'a été une première fois en 1994, aux bons soins de la maison Rivages. Celle-ci y revient aujourd'hui avec une édition augmentée, révisée et agrémentée d'un cahier photo. L'occasion de mieux comprendre pourquoi, avec une œuvre composée de quelques livres seulement (dont le célèbre Et au milieu coule une rivière, adapté au cinéma par Robert Redford), Maclean est bien considéré, au même titre qu'Harrison ou Carver, comme l'un des maîtres de ce que l'on a appelé « l'école du Montana ». Moins que de nature writing, c'est bien de human writing qu'il est question ici dans ce requiem bouleversant et fascinant.