Obama a gagné l'élection et signe le retour des Démocrates à la Maison-Blanche après l'ère Bush. C'est aussi le premier président noir. Alors, c'est un peu la victoire de tous les progressistes et de toutes les personnes de couleur de par le monde. On est à Londres, zone sud. Melissa et Michael sont invités chez des amis, black comme eux. Les convives « avaient passé la nuit du mardi à regarder les bleus manger les rouges ; eux aussi avaient vu les filles d'Obama monter sur scène d'un pas vif dans leurs petites robes bien coupées, et beaucoup d'entre eux avaient alors pensé aux quatre fillettes assassinées quarante-cinq ans plus tôt dans l'attentat à la bombe perpétré par le Ku Klu Klan contre une église en Alabama. »
Melissa et Michael dans Ordinary people de Diana Evans ne sont pas le power couple iconique que sont Barack et Michelle, mais forment un joli couple. Michael est « responsable RSE pour une société de gestion, un emploi solide et épargné par la récession économique », Melissa journaliste freelance dans la presse féminine, deux enfants. Ils n'habitent pas dans le luxe comme les frères Wiley, les hôtes de la fête, mais leur maison malgré des trucs à fixer (lui n'est pas bricoleur) est confortable, à l'image de leur vie commune de plus de dix ans.
Ils rentrent, enivrés par l'alcool et la musique. Ils sont sans les enfants, Michael a envie de Melissa, Melissa a plutôt envie de dormir, elle est déjà au lit. Quand il la voit mollir sous ses caresses, il enlève son jean, l'accroche à la penderie, la tringle s'effondre. Michael jure. Melissa commente : « Il faut la réparer. » « Il n'y aurait pas d'amour cette nuit. »
A l'existence faussement tranquille des « M&M » Diana Evans mêle d'autres vies : celles de l'ami de Michael, Damian- qui vient de perdre son père, un intellectuel de gauche de Trinidad-, et son épouse Stephanie- issue du comté chic de Surrey, d'un milieu commerçant, nouveau riche. Après quinze ans de mariage et trois enfants, Damian est frappé par le deuil, pas tant de l'unique parent qui l'avait élevé, comme le pense Stephanie, mais d'une autre vie, ailleurs, moins étriquée. Fan de groove, Michael, qui avait la tchatche et l'humour, lui aussi aurait peut-être préféré être animateur radio comme dans sa jeunesse. Charge mentale pour les unes, nostalgie de liberté pour les autres... Evans signe une subtile anatomie de l'individu en exil dans le couple, au cœur du South London. Du Tchekhov, avec John Legend, Snoop Dogg ou Mary J. Blige en bande-son.
Ordinary people - Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Karine Guerre
Globe
Tirage: 6 000 ex.
Prix: 22 euros ; 384 p.
ISBN: 9782211239684