C’est un livre unique qui touche intimement chaque génération qui le lit », confie à Livres Hebdo le réalisateur Michel Gondry, pour qui l’ouvrage est un de ces « phénomènes de société » a priori intouchable. En adaptant L’écume des jours, le roman culte de Boris Vian, le réalisateur ne voulait pas s’approprier l’univers de l’écrivain, mais « lui rendre hommage » à la manière d’un Sfar avec Gainsbourg. « Les lectures de Vian ont influencé mon travail, il avait une façon de penser qui me correspondait », nous explique-t-il.
Les inventions et néologismes de Vian se confondent avec l’imaginaire et les effets visuels bricolés du réalisateur. Il mélange différentes époques, crée le fameux Pianocktail (qu’on a pu voir sur un stand du Salon du livre), imagine le Biglemoi, danse improbable, et rétrécit, comme dans le livre, les espaces où vivent Colin et Chloé. Après tout, « ce sont les objets qui changent, pas les gens ».
Le projet lui a été proposé par le producteur Luc Bossi. Bossi écrit un premier scénario que Gondry fait évoluer. Le cinéaste réfute d’emblée l’idée que ce livre soit inadaptable. « Le roman est assez cinématographique : il y a vraiment un enchaînement, que je n’avais pas envie de modifier. » Cela n’empêche pas le cinéaste « d’intégrer le livre dans l’histoire » avec ces secrétaires qui rédigent le destin de Colin au fur et à mesure des événements. Pour lui,« c’est un livre fataliste », et il fallait montrer « que l’histoire était sur des rails », justifie-t-il. A l’écran, le livre existe avant que le film ne commence.
Le casting - Romain Duris, Audrey Tautou, Omar Sy, Gad Elmaleh… - aidera à séduire un public jeune et l’amener à voir le film en salle le 24 avril avant de découvrir le roman. Pauvert en publie cette semaine une nouvelle édition, préfacée par Frédéric Beigbeder. Le Livre de poche sort une édition spéciale avec un livret de 64 pages contenant des photos du film, des textes inédits et un dossier pédagogique. L’écume des jours s’est aussi décliné l’an dernier en BD avec une adaptation signée Jean-David Morvan et Marion Mousse (Delcourt). On retrouve le texte dans le volume 1 des Œuvres romanesques complètes de Boris Vian, parues dans la « Pléiade » en 2010. Audiolib ressort son livre audio lu par Arthur H avec une nouvelle jaquette. Enfin, les éditions des Saints-Pères publient à 1 000 exemplaires le fac-similé du manuscrit original daté du 10 mars 1946, entièrement rédigé au dos d’imprimés de l’Afnor où Boris Vian était employé, avec notes préparatoires à l’écriture du roman inédites en fin d’ouvrage. Par ailleurs, l’Ina sort en juin un coffret de 2 CD regroupant des enregistrements radiophoniques de Boris Vian dont chansons et musiques sont regroupées dans un triple CD, le 15 avril chez Mercury.
Vincy Thomas