L'écrivain chilien Luis Sepúlveda est décédé le 16 avril à Oviedo, en Espagne, à l'âge de 70 ans, succombant au Covid-19, dont il avait été atteint fin février après un voyage au Portugal.
Il était l'auteur d'Histoire d'une mouette et du chat qui lui apprit à voler, lauréat de plusieurs prix dont le prix Sorcières du roman et le prix Millepages Jeunesse, tous deux décernés en 1997, Le Vieux qui lisait des romans d'amour, son livre le plus emblématique, prix Relay du roman d'évasion et prix France Culture du roman étranger en 1992, Le Monde du bout du monde, Rendez-vous d'amour dans un pays en guerre et La Fin de l'histoire. Toute son œuvre, politiquement engagée et écologique, entre carnets de voyages, ethnologie, post-colonialisme et rejet des dictatures, est publiée en France chez Métailié. L'auteur s'est confronté à tous les genres : du roman noir au thriller, de la fable à la fresque, du récit autobiographique à la chronique désenchantée.
Parmi les nombreux prix qu'il a reçus, on notera aussi le prix de la Critique chilienne en 2001, le prix international Ovido en 1996 et le prix espagnol Tigre Juan en 1988.
Prisonnier et exilé
Militant des Jeunesses communistes au début des années 1960, l'étudiant, accusé et condamné de façon sommaire à 28 ans de prison pour trahison et conspiration, est emprisonné par la dictature du général Augusto Pinochet, séjournant deux ans et demi à Temuco avec d'autres opposants politiques. "J'ai beaucoup appris à Temuco, la prison où l'on enfermait les opposants politiques. Il y avait là-bas près de trois cents professeurs d'université, incarcérés eux aussi, qui nous faisaient partager leur savoir", expliquait-il.
En 1977, grâce à l'intervention d'Amnesty International, Luis Sepúlveda est libéré. Sa peine de vingt-huit ans de détention est commuée en huit années d'exil en Suède. De là, il voyage en Amérique du Sud. Il partage pendant un an la vie des indiens shuars dans le cadre d'un programme d'étude pour l'Unesco afin d'étudier l'impact de la colonisation sur ce peuple. Au Nicaragua, il s'engage dans la lutte armée aux côtés des sandinistes avant de devenir reporter.
En 1982, Luis Sepúlveda, journaliste, s'installe à Hambourg, en Allemagne, avant de collaborer avec l'ONG Greenpeace. L'écrivain décide ensuite de vivre dans les Asturies, dans le nord de l'Espagne, en intégrant notamment la Fédération internationale des droits de l'homme. Il crée et anime le Salon du livre ibéro-américain de Gijón, destiné à promouvoir la rencontre entre les auteurs, les éditeurs et les libraires latino-américains et leurs homologues européens. Par ailleurs, Luis Sepúlveda écrit des chroniques régulières dans El País, en Espagne, et dans divers journaux italiens.
Ecrivain prolifique
A partir des années 1980, il commence sa carrière d'écrivain. Son premier roman, publié en 1989, Le Monde du bout du monde, paraît en France en 1993. Son œuvre prolifique, romans, nouvelles, livres jeunesse et contes, comprend aussi Le neveu d'Amérique, Un nom de toréro, Journal d'un tueur sentimental, Hot Line, Les roses d'Atacama, La folie de Pinochet, Une sale histoire, Les pires contes, L'ombre de ce que nous avons été, La Lampe d'Aladino, Dernières nouvelles du Sud, Histoires d'ici et d'ailleurs, Ingrédients pour une vie de passions formidables...
Il aimait les "perdants", tels Cyrano et Don Quichotte, et il admirait les résistants, "ceux qui ont fait du verbe ‘résister’ chair, sueur, sang, et ont démontré sans faire de simagrées qu’il est possible de vivre debout, même dans les pires moments."
Son dernier roman, La fin de l'histoire, un thriller politique sur le Chili, paraît en 2016, simultanément au livre jeunesse, Histoire d'un chien mapuche, traduit par Anne-Marie Métailié elle-même.
Luis Sepúlveda était aussi un homme de cinéma. Il a réalisé deux longs métrages et deux courts métrages, prêté sa voix au rôle du poète dans La mouette et le chat, adapté de son ouvrage jeunesse Histoire d'une mouette et d'une chat. Son roman emblématique, Le vieux qui lisait des romans d'amour, avait aussi été transposé au cinéma par le cinéaste australien Rolf de Heer, en 2001.