Le prix Jan Michalski 2018 qui récompense chaque année une œuvre de la littérature mondiale a été attribué mercredi 21 novembre à l’écrivaine polonaise Olga Tokarczuk pour son roman Les livres de Jakób, publié aux éditions Noir sur Blanc et traduit par Maryla Laurent. La lauréate se verra remettre la somme de 50000 francs suisses (44000 euros) ainsi qu'une œuvre d’art par la Fondation Jan Michalski pour l'écriture et la littérature basée à Montricher, dans le Jura suisse.
Le jury a voulu distinguer une "une œuvre d’une immense érudition, à la richesse thématique impressionnante, et traversée par un souffle épique puissant. Une épopée universelle de la lutte contre la stagnation d’une pensée qui ostracise et asservit, qu’elle soit religieuse ou philosophique. Œuvre dense qui met en garde contre notre incapacité à accepter une société complexe, parce que diverse, menant ainsi aux ravages d’un communautarisme forcené, Les livres de Jakób raconte, avec une virtuosité époustouflante, le monde d’hier afin que nous comprenions mieux celui dans lequel nous vivons."
Déjà distingué du prestigieux prix Nike en Pologne et du prix Transfuge 2018, Les livres de Jakób narre les vies du personnage historique Jacob Frank (1726-1791), figure mystique du folklore religieux européen. Juif converti au christianisme, il fut à l’origine du frankisme, un mouvement sectaire polonais fondé autour de sa figure et des valeurs du catholicisme. Considéré par l’Eglise comme un charlatan et un hérétique ou comme le messie par ses partisans, il réussit à fédérer des centaines de fidèles dans toute l’Europe.
Icône de la scène littéraire polonaise, Olga Tokarczuk est diplômée en psychologie de l’université de Varsovie. Ses textes ont été plusieurs fois adaptés au théâtre et au cinéma, comme son roman Sur les ossements des morts (Noir sur blanc, traduction par Margot Carlier, 2012), porté à l’écran par la réalisatrice Agnieszka Holland en 2017. Traduit en plus de vingt-cinq langues, l’écrivaine a séduit bien au-delà des frontières de son pays, notamment au Royaume-Uni où elle a reçu le Man Booker International Prize 2018 pour Les pérégrins (Noir sur blanc, 2010, traduit par Grazyna Erhard).
La lauréate l’a emporté face aux deux autres finalistes du prix Michalski Yuval Noah Harari (Homo Deus, Albin Michel, traduction par Pierre-Emmanuel Dauzat, 2017) et Jean Rolin (Le traquet kurde, P.O.L, 2018). Elle succède au Français Thierry Wolton, récompensé l’an dernier pour les trois tomes de son Histoire mondiale du communisme, parus chez Grasset et Fasquelle entre 2015 et 2017.