Richard veut rentrer chez lui. Parvenu au terme d'une vie de fuites et de désirs, il n'a plus que cette volonté-là. Retrouver sa bicoque de campagne où l'attendent des chevaux et des souvenirs. Renouer le fil du temps. Cette fois, à ce spécialiste de la mort et de la transfiguration, des promenades au bord de ses abîmes, ce ne sera pas possible, et cet hôpital où il s'éteint sera sa dernière échappée belle.

Le comprend-il, Dominique, la première fois qu'il rend visite à Richard sur son lit de douleur ? Comprend-il que pour son ami de jeunesse - l'ami de la bande du lycée, si souvent en cavale mais jamais perdu, si ce n'est de vue, cet ami surgissant sans crier gare dans sa vie, ce passager de la nuit comme exilé de ses propres ténèbres - il n'y aura plus d'après ? Sans doute, mais restent les traces, les émotions, l'ombre portée de ces temps, où « le sirop des rues avait le goût de l'héroïne », que Richard aura traversés en prince incertain. Toute une vie à la petite semaine...

Pour son arrivée chez Stock, Dominique Fabre offre avec Je veux rentrer chez moi un très beau livre. L'auteur des Types comme moi, de J'aimerais revoir Callaghan (Fayard, 2007 et 2010) ou d'Il faudrait s'arracher le cœur (L'Olivier, 2012) est un virtuose du deuil. Son sens du territoire, sa mélancolie, son infinie élégance d'écriture, très « ligne clair-obscur », en font comme un Modiano de la banlieue ouest. Pour ce récit qui a tout d'un roman, il jette encore des éclats de souvenirs, autant de lumières pâles, inoubliables.