En plaçant l’innovation au cœur des enjeux de son congrès, la semaine prochaine à Clermont-Ferrand, l’Association des bibliothécaires de France (ABF) vient opportunément rappeler ce qu’on avait un peu oublié après dix ans d’ébullition technologique : celle-ci ne se réduit pas au champ du numérique. Mieux, le renouvellement des pratiques professionnelles procède avant tout d’une réflexion sur l’identité du métier des bibliothécaires, d’une remise à plat de leurs missions et d’une réinvention de leurs relations avec leurs publics, qui situe l’humain au centre de la stratégie des établissements.
A Lezoux, en Auvergne, l’innovation passe par l’élargissement du domaine de la bibliothèque publique en connectant les bibliothèques personnelles des habitants. A l’université Lille-1, elle prend la forme d’une intégration de la bibliothèque dans un projet scientifique plus vaste mêlant expérimentation et événementiel. A Languidic, dans le Morbihan, elle encourage l’échange de savoir-faire pour susciter de nouvelles logiques communautaires. A la bibliothèque Václav-Havel, à Paris, elle s’inscrit dans une stratégie audacieuse de réponse aux besoins parfois contradictoires de catégories d’usagers très différentes sans rompre la cohérence du projet de l’établissement. Si le numérique n’est jamais loin, il ne constitue plus une fin en soi, mais un instrument intégré aux projets et aux pratiques professionnelles.
Comme les bibliothèques, les librairies se réinventent en laboratoires d’une socialité fondée sur de nouvelles interactions entre les publics. S’inspirant d’expériences initiées depuis une bonne douzaine d’années aux Etats-Unis, plusieurs d’entre elles développent en leur sein même, sous diverses formes, des activités payantes qui leur apportent parfois des revenus complémentaires, mais surtout qui les ouvrent sur des bassins méconnus de clientèle et confortent et transforment leur position dans la cité.