Les temps sont durs pour les grands salons du livre francophones. Prenez celui de Genève : en 2020, il va à son corps défendant être délogé de ses dates historiques, à la charnière des mois d'avril et de mai, pour se tenir fin octobre. Quant à celui de Montréal, qui se déroule depuis plus de quarante ans à la mi-novembre, le voici lentement conduit à se décaler vers début décembre, au grand dam des libraires qui craignent une concurrence déloyale dans la pleine période des ventes de fin d'année.
Le succès de ces manifestations grand public n'est pourtant pas en cause. Le salon de Montréal draine chaque année quelque 120 000 visiteurs. A Genève, la semaine dernière, ils étaient près de 90 000. Peut-être même suscitent-ils des jalousies, car dans un cas comme dans l'autre, la pression d'autres secteurs économiques est à l'origine des difficultés qu'ils rencontrent pour conserver leur créneau dans le calendrier.
A Montréal, le Salon du livre ne pourra plus occuper la place Bonaventure en 2020 pour cause de travaux, et le Palais des congrès, sur le programme duquel les hôteliers de la ville jouissent d'une forte influence, rechigne à accueillir avant le mois de décembre une manifestation qui aura peu de retombées en termes de nuitées. A Genève, ce sont les horlogers qui ont jugé le créneau occupé jusque-là par le Salon du livre, en mai, plus séduisant que le leur, en janvier. Que pèse un livre devant une montre suisse ?
Le Festival de Cannes, lui, s'ouvre bien comme prévu le 14 mai, et les producteurs audiovisuels sont moins chiens avec l'édition que les hôteliers ou les horlogers. Renforçant le poids du livre en son sein, la manifestation accueille pour la première fois « Shoot the book! Rendez-vous », une version enrichie de l'opération Shoot the book! portée conjointement par la Scelf, le Bief, l'Institut français, la Sofia, La Copie privée, le CFC et Film Paris Région.