Alors que l’Île-de-France poursuit le développement de manuels numériques libres de droits dans les lycées de la région via la plateforme numérique Pearltrees qui regroupe une cinquantaine de manuels numériques fonctionnant avec de l'intelligence artificielle, la Corée du Sud est revenue en août dernier sur son projet de généralisation des manuels scolaires basés sur l’IA à l'ensemble du pays. Lancée en mars 2025 sous l’ex-président Yoon Suk Yeol, cette initiative, présentée comme un modèle d’éducation personnalisée, a perdu son statut officiel ainsi que son financement public.
Un projet ambitieux confronté à la réalité
Conçus pour offrir un apprentissage personnalisé grâce à des algorithmes avancés, les manuels scolaires alimentés par l’IA avaient mobilisé au moins 533,3 milliards de wons (385 millions de dollars) en 2024 avait alors indiqué un article du Korea Herald le 4 août 2025, date à laquelle l'Assemblée nationale sud-coréenne a adopté un projet de loi. Les manuels avaient été testés au premier semestre 2025 dans plusieurs matières : anglais et mathématiques pour les élèves de 3ᵉ et 4ᵉ année du primaire, ainsi qu’anglais, mathématiques et informatique au collège et au lycée.
Dès les premiers mois, enseignants et élèves avaient rencontré de nombreuses difficultés : logiciels instables, exercices inadaptés et contenus parfois erronés (D'après des informations de Futurism, relayées par We Demain). Face à ces critiques, le ministère de l’Éducation avait dû revoir sa feuille de route, optant pour un système d’adhésion volontaire. Résultat : seuls environ 30 % des établissements avaient choisi d’utiliser ces manuels.
Le texte adopté en août 2025 a alors restreint la définition des manuels scolaires aux livres imprimés et aux livres électroniques traditionnels. En excluant explicitement les « logiciels d’aide à l’apprentissage utilisant des technologies de l’information intelligentes », il avait rétrogradé les manuels basés sur l’IA au rang de simples ressources pédagogiques, dépourvues du statut officiel qui avait justifié leur financement public. Même les établissements volontaires se retrouvaient désormais sans financement.
Conséquences pour l’édition
Ce retournement politique a alors directement menacé les entreprises ayant investi massivement dans ces outils, misant sur une adoption nationale. Selon le secteur, près de 800 milliards de wons avaient déjà été dépensés dans la conception, la recherche et l’ingénierie des manuels scolaires basés sur l’IA.
Plusieurs maisons d’édition ont engagé des recours administratifs contre le ministère de l’Éducation, dénonçant des pertes causées par des changements de cap successifs. Des manifestations individuelles ont également été organisées devant l’Assemblée nationale, et certaines délégations se sont rendues au siège du Parti démocrate pour demander un réexamen du projet de loi.
La situation française en perspective
En Île-de-France, la volonté de développer des manuels numériques suscite également des craintes dans le secteur de l’édition. Guillaume Montégudet, directeur du pôle éducation et formation d’Humensis et membre du bureau de l’Association des éditeurs scolaires, a dénoncé en septembre dernier la réduction drastique des budgets pour les manuels numériques et l’arrêt du financement des manuels papier.
Selon lui, le format imposé fragilise le suivi pédagogique, creuse les inégalités et limite la liberté des enseignants. Les éditeurs s’inquiètent également de l’impact sur la diversité éditoriale et sur leur modèle économique, pointant un risque de standardisation régionale.
De son côté, Valérie Pécresse, présidente de la région Île de France, avait estimé en septembre dernier que les éditeurs avaient « un peu raté le coche » du numérique et les avait encouragés à se mettre à la page.
