Avant-Critique Récit

L'empreinte des disparus. Elle longe les quatre grands estuaires de la façade Manche-Atlantique et relie la Belgique à l'Espagne en évitant Paris. La route des Estuaires est aussi le titre du nouveau livre de Julie Wolkenstein. Pour l'écrivaine, l'itinéraire s'est longtemps arrêté à Saint-Pair-sur-Mer, dans la Manche, où se situait la maison « encombrée de souvenirs et peuplée de fantômes » évoquée dans son pré-cédent ouvrage, Et toujours en été (P.O.L, 2020).

Le prolongeant, ce récit autobiographique nous mène jusqu'en Bretagne, où l'autrice a retrouvé (ou plutôt, été retrouvée par) un témoin du drame ayant marqué son enfance comme ses écrits d'une imperceptible empreinte, structurante pourtant. « J'avais dix-huit mois lorsque mon petit frère est né, le 5 décembre 1969, et presque vingt mois lorsqu'il est mort, le 25 janvier 1970. Je n'en ai aucun souvenir. » De ce petit frère mort accidentellement, aucun portrait exposé, aucune mémoire évoquée. Trop petite pour en garder la moindre image, l'écrivaine pose dans ce livre les questions qu'elle n'a pu poser au moment des faits.

Déroulant le fil de la petite enfance, La Route des Estuaires mêle deux figures de disparus : celle du défunt et celle, romanesque, d'une jeune Bretonne découvrant Paris en 1968 qui semble elle aussi chercher la vérité sur la mort du bébé. Assemblant les pièces une à une, le poignant récit de Julie Wolkenstein reconstitue le puzzle d'existences marquées par une absence autour de laquelle elles ne cessent de graviter.

Julie Wolkenstein
La Route des Estuaires
P.O.L
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 17 € ; 144 p.
ISBN: 9782818057360

Les dernières
actualités