25 AOÛT - PREMIER ROMAN France

Sans doute la narratrice endeuillée de cette histoire classerait-elle cette mort-là dans la catégorie des "morts absurdes », celle de son compagnon trentenaire, dans un accident de la circulation au Brésil, dans le taxi qui le conduisait à l'aéroport à la fin d'un voyage d'affaires.

Samuel ne rentrera plus jamais chez lui. A Paris, la nouvelle de cette disparition fait l'effet d'une déflagration sourde qui ralentit les gestes et les pensées, qui fait que l'on s'absente de son corps, de sa vie. Peu de complaisance avec ce chagrin : la jeune femme, traductrice scientifique, ne se maltraite pas le coeur en plongeant dans les souvenirs. Passant par toutes les étapes de l'après, comme dans A présent, le terrible récit de Brigitte Giraud, ce roman évoque aussi une autre dimension du deuil : le partage du mort. Avec sa mère anéantie, qui parle insupportablement de son fils à l'imparfait ; avec sa soeur Flavie, joli personnage de voyageuse, qui note des phrases dans un carnet bleu et envoie des lettres écrites aux stylos de couleur, accompagnées de pétales de fleurs et d'ailes de papillons.

Outre sa grande sobriété, ce premier roman de Lise Beninca, auteure de Balayer fermer partir, un récit paru en 2008 au Seuil, tempère le pathos en intercalant entre les états d'âme des notes de physiologie - descriptions de la composition des larmes, du muscle cardiaque, de la moelle épinière, de la peau... -, "emprunts et détournements », est-il précisé à la fin du livre, à des manuels d'anatomie humaine. Une trouvaille d'écriture et de construction qui apporte une singulière émotion.

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