Dans les romans de JJ Bola, il est question d'exil. Comme dans Nulle part où poser sa tête, qui retraçait le destin d'une famille congolaise sans papiers à Londres. Ce premier roman avait été remarqué pour la justesse avec laquelle il témoignait de la précarité et du racisme vécus par des réfugiés en Europe, ainsi que de la forte solidarité entre les exilés, seule condition pour tenir et supporter. Poète et essayiste - il est notamment l'auteur d'un essai sur la masculinité, pas encore traduit -, JJ Bola confirme son talent d'écrivain avec ce deuxième roman.
Dans Le chemin du retour, JJ Bola aborde la question de l'exil sur un mode beaucoup plus introspectif, intime, à travers le personnage de Michael, professeur dans un lycée de Londres. De plus en plus sujet à des angoisses et au mal-être qui s'installe, Michael relate son quotidien dans l'établissement, ses relations avec les élèves, les cours qui se déroulent souvent dans le tumulte, la fatigue permanente, son enfance au Congo et le fait d'être noir dans une équipe majoritairement composée de Blancs.
Ce qu'il décrit, c'est surtout la lente détérioration de son état mental, la manière dont il cache sa dépression latente et progressive sous un visage affable et des expressions forcées. Car sous son apparence solide et malgré un environnement stable - des amis, une compagne, une mère, un travail, un logement -, Michael perd peu à peu la face. Et son moi se dédouble ainsi, entre pensées intérieures insupportables et sourires affichés à l'extérieur, jusqu'à ce qu'il décide de démissionner, de partir aux États-Unis pour dépenser les 9 000 livres qu'il lui reste, et de mettre fin à ses jours. Dans ces moments où l'introspection interrompt le cours banal de l'existence et même le sommeil, il se laisse traverser par les images les plus intenses, les plus morbides : « Écoutez ces mots, je veux mourir, pourtant je ne parle pas en homme qui veut mourir, mais en homme qui veut vivre, et mourir est le seul moyen que je connaisse pour y arriver. » Mais le destin pousse parfois vers d'autres directions que celles vers lesquelles on se sentait déterminés à aller, et l'espoir s'immisce là où plus rien ne semblait fertile.
Le chemin du retour Traduit de l’anglais par Johan-Frédérik Hel Guedj
Mercure de France
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 24 € ; 250 p.
ISBN: 9782715258532