Du monde et des heureux. Le parc du Cours, en bordure de Moselle à Épinal (Vosges), accueillait du 25 au 28 mai la 22e édition des Imaginales, placée cette année sous le signe du « Futur de la Cité », thème de la programmation 2023. Le site historique du premier festival français de fantasy n’a pas désempli durant quatre jours, accueillant sous un grand ciel bleu une foule dense de visiteurs venus rencontrer les grands noms du genre (Bernard Werber, Pierre Bordage, Jean-Philippe Jaworski, Claire Duvivier...), ainsi que de nombreux jeunes auteurs.
La qualité de l’affiche et l’excellente affluence sont autant de motifs de satisfaction pour la nouvelle équipe en place : il faut dire qu’après 20 ans de direction artistique assurée par Stéphanie Nicot et deux dernières éditions mouvementées, le nouveau directeur artistique Gilles Francescano était attendu au tournant. Pour rappel, en 2021, de nombreux auteurs avaient violemment réagi à l’affaire Stéphane Marsan (du nom de l’ex-patron des éditions Bragelonne accusé de harcèlement sexuel) ; en 2022 ce sont la programmation et les thématiques de plusieurs tables rondes qui avaient été critiquées par une large part des auteurs. Sur la sellette, Stéphanie Nicot avait finalement été remerciée quelques mois plus tard.
Lire : Les Imaginales à l’épreuve du changement
Recruté début septembre 2022, Gilles Francescano, illustrateur depuis plus de 30 ans et déjà riche de son expérience de commissaire d’expositions aux Utopiales de Nantes, s’est appliqué à bâtir une programmation qui « n’exclut personne. » « Certains éditeurs considéraient toujours le festival avec bienveillance mais ne pouvaient s’empêcher de rappeler ce qui s’était passé lors des dernières éditions. Mon travail en arrivant a été de nettoyer les scories du passé », confie cette figure de l’imaginaire dont l’arrivée est globalement saluée par les festivaliers. Aux côtés de son autrice coup de cœur Morgane Caussarieu, Gilles Francescano a notamment invité l’autrice québécoise transgenre Sophie Labelle.
Jérôme Vincent sur le stand des éditions ActuSF- Photo CHARLES KNAPPEKPour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.
Le maire d’Épinal Patrick Nardin se veut sur la même ligne. « Nous construisons l’avenir du festival sur les fondamentaux posés par Stéphanie Nicot », explique l’édile. Le message est bien passé du côté des éditeurs : « L’arrivée de Gilles nous a rassurée, indique par exemple Jérôme Vincent, patron des éditions ActuSF. Nous avons toujours affiché notre soutien à Stéphanie Nicot. L’enjeu pour nous était de savoir quelle direction prendraient les Imaginales. » De la même manière, la gérante de la librairie Au moulin des lettres Laurence Grivot salue le travail du nouveau directeur artistique. « Gilles Francescano est une personnalité respectée et avec beaucoup d’expériences, il sait aussi être à l’écoute pour faire évoluer les Imaginales », se félicite-t-elle. La libraire a tenu le pôle BD pendant tout le festival et pousse pour accorder plus de place aux scénaristes et coloristes. Du côté de la mairie, le développement d’un pôle jeunesse plus conséquent est déjà dans les tuyaux.
Enfin, si les Imaginales entendent rester fidèles à leur dominante imaginaire de toujours, l’événement compte aussi s’ouvrir à d’autres thématiques. La littérature blanche est appelée à prendre de l’importance et Patrick Nardin annonce d’ores et déjà « des surprises » s’agissant du programme de l’édition 2024. La mise en synergie cette année avec La fête des images, autre rendez-vous phare d’Épinal, a par ailleurs permis d’amplifier la résonance du festival dans la ville. « Nous allons continuer à développer les Imaginales pour accroître leur rayonnement à l’échelle européenne », conclut Patrick Nardin.
Une terre d’accueil pour les auteurs autoédités
De nombreux auteurs autoédités (en grande majorité des autrices) participent chaque année aux Imaginales. S’ils n’ont pas accès à la Bulle, saint des saints réservé aux maisons d’édition, ils n’en bénéficient pas moins de l’excellent accueil du public spinalien. Rencontrées sur le stand qu’elles partagent toutes les deux, Lyn Amelia Lewis et Mélanie Wency ont par exemple investi 500 euros pour 4 jours de présence dans le parc du Cours. « Sur un festival comme les Imaginales, j’ai besoin de vendre une cinquantaine de livres pour être rentable, explique Lyn Amelia Lewis, grande habituée des salons et festivals. A la Japan Touch de Lyon, mi-mai, l’écrivaine a déjà vendu 75 exemplaires de ses romans. « Les lecteurs sont toujours ravis de nous rencontrer et d’obtenir une dédicace, sourit-elle. C’est encore plus vrai aux Imaginales qui se déroulent dans le cadre magique du parc du Cours. »
Invitée sur le stand BooksOnDemand, Julie Muller Volb participe pour la 2e fois aux Imaginales. D’abord publiée chez France Loisirs Nouvelles Plumes puis passée à l’autoédition en 2020, elle vit aujourd’hui entièrement de son travail d’écrivaine et affiche neuf romans au compteur. « Je participe à une dizaine de festivals et de séances de dédicaces par an, explique l’intéressée. Ces rencontres représentent environ 10 % de mes ventes, elles sont surtout l’occasion de créer des liens avec mes lecteurs. » Croisée un peu plus loin sur un stand qu’elle partage avec quatre autres autrices, Lucile Chaponnay dresse elle aussi un excellent bilan de sa présence à Épinal. « J’étais déjà venue l’an dernier et j’avais vendu 70 livres, ce qui a représenté un chiffre d’affaires de 1 300 euros, détaille cette écrivaine de 28 ans. Tous les salons n’acceptent pas les autoédités. Ici nous sommes très bien reçus dès lors que l’on peut justifier d’un certain niveau de professionnalisme et de qualité. Les visiteurs viennent facilement nous voir, chaque livre vendu contribue à développer ma communauté et à fidéliser de nouveaux lecteurs. »
Pour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.
Pour télécharger ce document, vous devez d'abord acheter l'article correspondant.


