Claire Angot (Lonely Planet) : “Ce métier a un côté étourdissant”
Parcourir le monde, dormir à l’hôtel et dîner au restaurant tous frais payés, c'est le métier des auteurs de guides de voyage. Pourtant, on en sait peu sur cette profession qui fait rêver. Parcours, recrutement, galères, souvenirs inoubliables… Nous lançons aujourd’hui une série pour mieux connaître ces voyageurs pas comme les autres. Chaque volet sera le témoignage d’un auteur d’une maison d’édition. Cette semaine, Claire Angot de Lonely Planet.
Par
Manon Quinti Créé le
10.07.2014
à 19h27, Mis à jour le 18.07.2014 à 10h40
Après avoir sillonné la France de long en large pour France 3, cette Haute-Normande de 32 ans travaille depuis deux ans pour l'éditeur. Elle nous parle de sa passion du voyage, mais aussi de son statut "très précaire" et de ses journées "épuisantes".
Qu’est-ce qui vous a menée à l’édition touristique ?
Je me suis toujours intéressée au patrimoine régional, ça me vient de mes parents : ils avaient toujours cette envie de découvrir des choses, même tout près de chez nous. J’ai commencé en tant que journaliste. Je suis passée par l’Ecole supérieure de journalisme à Lille. J’ai travaillé pour les quotidiens Paris-Normandie, Corse Matin, La Voix du Nord. Puis j'ai intégré France 3 régions. J'y faisais beaucoup de sujets "cartes postales" sur telle église, telle réserve naturelle… Au bout de trois ans de CDD accumulés, ils n’avaient plus vraiment le droit de me faire travailler. J’ai pensé à Lonely Planet car je voyageais beaucoup avec leurs guides. Plusieurs fois je m’étais dit "Moi j’aurais écrit ça, il manque ça". Je trouvais qu’ils avaient une démarche plus journalistique, avec plus de rencontres et d'interviews que chez les autres éditeurs. Et vu mon parcours, ça me paraissait logique. Tout bêtement, je leur ai envoyé un CV et une lettre de motivation. Je n’ai même pas candidaté chez les autres éditeurs de guide. Deux jours après, on m’a rappellée. J’ai eu un entretien dans la semaine.
Comment avez-vous été "recrutée" ?
Le directeur éditorial m’a posé des questions sur mon parcours à France 3 régions, sur les coins de France que je connaissais bien, sur mes aptitudes rédactionnelles, il a regardé mon pressbook… Ensuite, il m’a fait passer un test d’écriture de quelques jours dans une ville de France que je connaissais peu. J’ai choisi Clermont-Ferrand. C’était très impressionnant. Je ne m’attendais pas à quelque chose de facile, mais c’était vraiment éprouvant. La semaine d’après j’avais déjà ma première commande, une cinquantaine de pages sur la Vendée.
Quelles sont les difficultés du métier ?
Je pars en moyenne deux ou trois mois dans l’année, pour deux ou trois titres. Les journées sont chargées, on se retrouve avec un stock d’informations impressionnant. Le soir on est lessivé, ça a un côté étourdissant. Quand on rentre on doit se mettre à écrire mais on n’a pas le temps de récupérer. C’est parfois difficile de trouver l’inspiration, surtout quand on a visité sous la pluie. Et puis on n’est pas forcément bien accueillis. Les gens n’aiment pas toujours être jugés. Certains se sentent piégés. Ils ont peur qu’on écrive des choses négatives. Mais il y a aussi de très beaux moments et de belles rencontres.
Quel est votre statut ?
Je touche des droits d’auteur. On me propose un projet avec un forfait déterminé au préalable, qui peut être ajusté si j’ai eu besoin de plus de temps. Je perçois une moitié au début de l’enquête et une autre à la fin.
La source média référencée est manquante et doit être réintégrée.
Arrivez-vous à en vivre ?
Je complète avec des piges pour les pages voyage de la presse généraliste. J'ai par exemple récemment collaboré au supplément tourisme été de L'Express. Mes contrats avec Lonely Planet se renouvellent au fil de l’eau tous les trois mois. En tant qu'auteur, je n’ai pas droit aux congés payés, je ne cotise quasiment rien pour moi. C’est assez précaire. Je sais qu’on ne peut pas tout avoir, la sécurité de l’emploi et un métier qui nous passionne. Mais en terme de perspective d’avenir, c’est un peu compliqué.
Quelle est votre pire souvenir ?
J’étais partie loin à pied pour trouver une plage secrète, qui n’était en fait pas assez accessible pour figurer dans le guide. J’ai voulu me rafraîchir avant de repartir, et j’ai marché sur un oursin. C’était horrible. Une dame m’a tout enlevé à la pince à épiler… J’ai rejoint ma voiture en boîtant.
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Et votre meilleur moment ?
J’étais venue tester une cabane à huîtres dans le littoral charentais. Le gérant avait fait la fête toute la nuit avec les employés pour fêter la fin de la saison. Le lendemain ils avaient tous la gueule de bois, personne n’est venu travailler. Quand je suis arrivée, le patron m’a dit : "Ah tu tombes bien, tu sais servir ? J’ai vraiment besoin d’une serveuse, je t’offre le repas !". Je me suis retrouvée à apprendre à ouvrir des huîtres… Je suis restée une bonne partie de l’après-midi alors que ce n'était pas prévu. C’est le genre de rencontres marrantes auxquelles on ne s’attend pas. J’ai inscrit l’adresse dans le guide, mais sans préciser ce qui s’était passé…!
Petite bibliographie
Corse : pour découvrir le meilleur de la région - avec Jean-Bernard Carillet et Olivier Cirendini (avril 2014)
Vendée et Charente-Maritime : pour découvrir le meilleur de la région - avec Maud Hainry, Jean-Bernard Carillet et Marie Dufay (avril 2014)
Lyon en quelques jours (2013)
Savoie, Mont-Blanc : pour découvrir le meilleur de la Savoie et de la Haute-Savoie - avec Edouard Bal (2013)
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Par
Élodie Carreira
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