Pourquoi réfléchir aujourd’hui à la participation du public dans les bibliothèques ?
La participation du public dans les bibliothèques est une question déjà ancienne. C'est le développement d'outils numériques et de technique de ludification qui l'ont rendue plus visible et plus accessible à tous. La participation est aussi une thématique centrale dans la réflexion sur les bibliothèques en tant que tiers lieux. On voit ainsi apparaître des activités autour du jardin, des soirées jeux de rôle, des ateliers scoubidous ou biblio-remix [atelier où les participants conçoivent la bibliothèque idéale]…
Quelle est la recette d'un atelier participatif réussi ?
Ce que l'on retient surtout, c'est la nécessité d'installer une ambiance qui laisse la porte ouverte à la participation : avoir une attitude d’écoute ouverte et un décor chaleureux. Par exemple, des mugs à disposition des usagers pour des boissons chaudes... On voit aussi que les actions participatives naissent après plusieurs mois d'une relation informelle et bienveillante avec un ou plusieurs usagers. Et que finalement, on retient autant les grandes actions ambitieuses (comme les journées consacrées aux biblio-remix), que les petites actions nécessitant très peu de moyens, comme les post-its laissés à destination des usagers pour qu'ils donnent leur avis sur les livres lus.
La bibliothèque parisienne Louise-Michel a également parlé de l’importance de "la culture du test" : de quoi s’agit-il ?
La culture du test, c'est le fait d'essayer plein de choses sans avoir peur de l'échec : si on se plante, ce n'est pas grave. Cela implique qu'au sein de la bibliothèque, l'ensemble de l'équipe soit sur la même longueur d'onde : un responsable hiérarchique ne va pas reprocher à un agent d'avoir tenté et de s'être planté, si les grandes missions de la bibliothèque - qualité d'accueil et médiation culturelle - sont maintenues.
Une table ronde portait sur les enquêtes auprès des usagers. En quoi sont-elles un moyen pertinent pour les associer à des projets qui les concerne ?
L’enquête est un premier pas seulement, car elle ne leur permet qu’une expression limitée de leur point de vue. On pourrait aller encore plus loin si on associait les usagers. Les deux intervenants, Christophe Evans (spécialisé dans la sociologie de la lecture et des usages des bibliothèques) et Cécile Touitou (responsable de la mission Marketing à de la bibliothèque de Sciences Po), ont aussi insisté sur la nécessité de bien veiller à la représentativité des publics consultés. Ils ont rappelé que "l’usager n’est pas le meilleur expert des bibliothèques". On peut donc interroger les usagers sur leurs besoins et sur leurs degrés de satisfaction, mais il faut expliquer aux usagers comment les choix sont faits à l’issue des enquêtes. Et selon Christophe Evans, les entretiens guidés sont une technique plus propice que les simples questionnaires
Un atelier était consacré à l’outil Archilab. Quel est l'intérêt de ce jeu de plateau ?
Il permet d’interroger les espaces et leurs usages. Concrètement, quatre à six personnes manipulent des pièces sur un plateau qui peut reconstituer la bibliothèque, un centre de documentation, une salle de classe... Ils permettent de penser et de mettre en maquette des espaces de travail les plus favorables à l’apprentissage. C’est un outil “physique”, contrairement à Minecraft, qui est un monde virtuel.
En pleine crise sanitaire, dans quelle mesure est-ce possible d'organiser des animations participatives en bibliothèque ?
Beaucoup de rencontres avec des auteurs ou des ateliers ne sont plus possibles en “présentiel”. Mais on peut organiser des ateliers en “distanciel”. Hier, la médiathèque de Verdun a par exemple demandé à une trentaine de personnes, réunies en ligne, de construire les espaces de la future bibliothèque, qui était reconstituée virutellement sur Minecraft. Mais il faut penser aux publics qui ne sont pas à l’aise avec le numérique. Les médiathèques sont des lieux de rencontre, et rien ne remplace le présentiel.