Les amateurs de littérature, de musique et de bande dessinée mais aussi les jeunes, un des nombreux motifs de fierté des organisateurs, ont pu trouver leur compte, voire leur bonheur, à Beyrouth du 2 au 8 octobre. 90 rencontres avec des auteurs ont pu notamment avoir lieu dans les écoles, collèges, lycées et université (contre 56 l’année dernière) grâce à une logistique très serrée du coordinateur de ce volet Karl Soued. Avec à chaque fois la même émotion face au sérieux des élèves beyrouthins : « Ils avaient tous lu mon livre, avaient des questions très pertinentes, que ce soit au collège, où ils avaient même préparé des petites saynètes, qu’à l’université, où les questions étaient forcément plus politiques », nous confie l’écrivain Yahia Belaskri après une table ronde autour des questions de littérature et de journalisme, dans la montagne du Chouf. En effet, comme l’année dernière où le salon devenait un festival pour la première fois, ces rencontres ont eu lieu dans tout Beyrouth et dans tout le pays. « Après 25 ans sur le modèle d’un salon conventionnel, et suite aux crises successives, il était temps de changer de format », nous rappelle Herminée Nurpetlian, la coordinatrice générale du festival, tout en se réjouissant de l’agrandissement, par rapport à l’année dernière, de l’espace librairie, ouvert pour le dernier week-end à l’ESA – l'ancienne ambassade de France devenue une école de commerce sous l’impulsion de Jacques Chirac et de Rafic Hariri en 1996.
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Case redépart
Les professionnels non plus n’étaient pas en reste. « Il y a quelque chose qui redémarre », a confié à Mathieu Diez, l’attaché culturel pour le livre et le débat d’idées et commissaire général de Beyrouth Livres, le directeur général du Bureau international de l'édition française (Bief) Nicolas Roche, dont la présence semblait confirmer cette note positive. Positifs furent également les retours après la journée des professionnels, à laquelle ont participé de nombreux acteurs des métiers du livre libanais comme français sur des thèmes aussi variés que « La traduction : enjeux, difficultés et opportunités », la communication, avec l'illustrateur Alexandre Clérisse qui a raconté les coulisses de la conception de l’affiche du Festival, ou l’intelligence artificielle, organisée par Pascal Mougin, professeur en littérature et spécialiste de l’IA.
Le directeur des éditions Riveneuve Gilles Kraemer, à la suite de celle-ci, nous a confié craindre que la majeure partie de la production soit de plus en plus automatisée et standardisée, et que l’édition telle que nous la connaissons ne devienne réservée à une élite de plus en plus rare.
–50 % pour les ouvrages jeunesse ?
Mais dans un pays dont on ne souhaite à aucun le sort ces dernières années, l’énergie, l'inventivité et la volonté des professionnels ne se dément jamais. Pour pallier l’inflation inimaginable et la perte de pouvoir d’achat qui a suivi, une initiative amorcée par l'Institut français avec le ministère des Affaires étrangères et portée par les trois grands libraires-éditeurs et importateurs de livres français (Les librairies Antoine, Stephan et la Librairie orientale) est en train de voir le jour. Un FSPI (fonds de solidarité pour les projets innovants), devrait permettre d'imprimer à l'identique des livres français au Liban – une centaine de titres jeunesse pour commencer –, ce qui réduirait le prix des livres de 50 %. L'opération serait accompagnée de contenus digitaux inédits et toucherait dans un premier temps 20 % des 250 000 élèves francophones du pays.
Dans deux semaines, un salon international adoptant les trois langues du pays se tiendra à Beyrouth. À l’initiative des syndicats de libraires et d’éditeurs, ainsi qu’un salon strictement arabophone par la suite. Une multiplication d’initiatives assez intrigantes mais suivies de près par l’équipe de l'Institut français qui pourrait, pourquoi pas, essayer de s'en rapprocher à l’avenir. En espérant que les récents événements ne viendront pas couper court à cette énième renaissance libanaise.