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80 ans après la libération des camps, les livres comme mémorial de la Shoah

Auschwitz-Birkenau vu par Raymond Depardon - Photo Calmann-Lévy

80 ans après la libération des camps, les livres comme mémorial de la Shoah

Alors que 2025 marque les 80 ans de la libération des camps, l’édition française se mobilise pour faire vivre la mémoire de la Shoah. À travers textes, images, essais ou bande dessinée, les livres se dressent comme autant de pierres levées contre l’oubli.

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Par Apollonia Elia
Créé le 16.06.2025 à 17h00

Les éditions Calmann-Lévy, dont l’histoire fut elle-même marquée par la Seconde Guerre mondiale et l’Occupation, s’associent au Mémorial de la Shoah pour publier plusieurs ouvrages inédits. Le 25 juin paraîtra Auschwitz-Birkenau vu par Raymond Depardon, un recueil des photographies prises par le grand photographe français, lesquelles donneront également lieu à une exposition au Mémorial de la Shoah à Paris du 26 juin au 9 novembre 2025. Ce projet visuel, à la fois sobre et frontal, entend confronter les visiteurs à la matérialité du crime.

Quand l’édition s’allie à la mémoire

Cette parution à venir s’inscrit dans une série de coéditions entre Calmann-Lévy et le Mémorial. En janvier, paraissait Auschwitz : une monographie de l’humain du directeur du musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Piotr M.A. Cywiński. Un ouvrage rigoureux et bouleversant, structuré autour des récits de survivants, dans lequel l’auteur exhorte à replacer l’humain broyé, résistant et effacé au centre de l’histoire du camp. Déjà écoulé à près de 3 000 exemplaires selon Gfk, ce livre témoigne d’une appétence renouvelée du public pour les textes de mémoire. En septembre, une autre publication viendra compléter cette trilogie : Se souvenir des morts, recueil de discours prononcés lors des cérémonies de la Hazkarah, dans lesquels s’élèvent les voix de Bernard-Henri Lévy, Boris Cyrulnik ou Robert Badinter.

Écrire et réécrire la Shoah

L’année 2025 est marquée, plus largement, par une recrudescence éditoriale autour de la Shoah. Certains ouvrages prolongent l’effort de témoignages sans commentaire : Auschwitz : l’image comme source, signé Tal Bruttmann et Christoph Kreutzmüller (Seuil, août 2025), scrute les rares clichés issus des camps. D’autres, comme Les Mémoires de la Shoah (Dupuis, janvier 2025), misent sur l’accessibilité et la transmission intergénérationnelle : cette bande dessinée, scénarisée par Théa Rojzman et illustrée par Tamia Baudouin, adapte les témoignages recueillis par la journaliste Annick Cojean dans un langage graphique.

Enfin, l’approche universitaire n’est pas en reste : l’ouvrage collectif Écrire la Shoah : trauma et représentation (Classiques Garnier, février 2025), dirigé par Aurélien Demars, Monica Garoiu et Ana-Maria M’Enesti, explore les formes esthétiques de la mémoire. Littérature des camps, architecture commémorative, musique funèbre : tout un langage de la perte se déploie, à la fois pour dire l’indicible et affronter le risque de banalisation.

À l’heure où les derniers survivants s’éteignent, la littérature, sous toutes ses formes, prend le relais. Non pas pour tourner la page, mais pour la maintenir ouverte, indéfiniment.

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