Ce que c’est que la gloire, tout de même. Une femme infidèle. Peut-être parmi toutes celles qui croisèrent la route, et finalement le destin, de Roger Vadim, la plus inoubliable. Plus encore que Marie-Christine, que Catherine, qu’Annette et toutes les autres. Et plus même que Brigitte. Qui se souvient que, dans la France des années 1950, cette France limitée pour lui à trois capitales, Paris, la Côte d’Azur et Megève, Vadim incarna une sorte d’alternative masculine à la "folie" Sagan ? On l’envia, on le loua, on le critiqua, et puis on l’oublia. Le cinéaste ne méritait ni tant d’éloges ni les indignités qui suivirent. Il eut au moins le mérite, essentiel, de voir chez une petite-bourgeoise délurée du 16e arrondissement de Paris l’incarnation triomphante de la jeunesse, autant que le potentiel érotique de celle qui allait devenir sa femme, Brigitte Bardot. Avoir "vu" BB, l’avoir offerte au plus grand nombre, vaut postérité pour l’Histoire et pas que celle du cinéma. L’homme, lui, incarnation du playboy tel que l’époque le rêvait, ne manquait pas de panache, menteur, truqueur, hâbleur sans doute, mais attaché avant tout à ne laisser contraindre en rien l’expression souveraine de sa liberté. Ce genre d’oiseau solitaire est assez celui d’Arnaud Le Guern, comme l’a déjà démontré son formidable Une âme damnée : Paul Gégauff (Pierre-Guillaume de Roux, 2012). Avec ce Vadim, un playboy français, il nous offre moins une biographie qu’une promenade buissonnière dans les contre-allées de la vie du cinéaste. S’il ne se défend pas de la sympathie que son "héros" lui inspire, il n’en cache pas les zones d’ombre, les secrets plus ou moins crapoteux que sa vie recèle aussi. Peu importe, ce qui compte c’est le geste, le parfum d’élégance et de scandale qui flotte sur tout cela, ces années évanouies avec le souvenir d’un homme qui ne sut vivre qu’au présent. O. M.
Arnaud Le Guern, Vadim, un playboy français, Séguier. Tirage : 2 000 ex. Prix : 16 euros ; 270 p., ISBN : 978-2-8404-9687-8.
