"A Pékin tout peut arriver. Le pire est toujours possible." Le meilleur aussi car c’est là où vit Xu Zechen. Depuis la sortie de trois romans et d’un recueil de nouvelles, il fait partie des vingt auteurs chinois les plus prometteurs. Dynamique, voire un brin sarcastique, Pékin pirate se déroule là où il réside, une ville grouillant de vie. Plus qu’un décor, un corps s’époumonant au rythme de ses habitants. Or, il y a ceux qu’on ne voit pas, tant ils mènent une existence parallèle. Celle-ci a ses propres lois, parce qu’elle est régie par une seule philosophie : la survie.
A peine sorti de prison, DunHuang a "l’impression de vivre à l’écart, en périphérie". Il se fond dans la métropole pékinoise. Cet homme est sans le sou et ne connaît plus personne, puisque son gang de faussaires a été démantelé. Par chance, sa route croise celle de Xia, vendeuse de DVD piratés. Il reprend le même métier et s’ouvre ainsi au cinéma. "Les arts, ça en impose", mais les films pornos sont plus lucratifs. Désillusionnée, sa complice rêve de fonder une famille, mais elle n’ose s’aventurer sur le terrain miné des sentiments. "Qui te demande d’aimer ?"
DunHuang est mis à la rue lorsque cette "femme au cœur trop lourd" renoue avec son ex. "Son cœur est amer. A présent, il est un mort-vivant." Commence alors une errance dans les bas-fonds aux conditions précaires. Elles engendrent les magouilles et la prostitution. "Nul ne connaît le tréfonds de ceux qu’il côtoie." Malgré la solidarité entre âmes paumées, c’est le règne de la solitude. La foudroyante QiBao va néanmoins bousculer DunHuang. Son côté bon enfant tranche avec la dureté de leur quotidien. Un Rosetta (les frères Dardenne) aigre-doux, version chinoise. "Il suffit d’être heureux au jour le jour." Kerenn Elkaïm