Si son titre, La grande aventure du sexe, laisse imaginer plusieurs sujets, le livre de Léo et Colas Grasset ne traite pas de celui auquel on pense le plus communément. Il est produit par les deux frères, tous deux installés à Chiang Mai (Thaïlande), à partir du travail pédago-humoristique réalisé par le premier, un jeune biologiste né en 1989, sur sa chaîne YouTube, DirtyBiology (450 000 abonnés, 23 millions de vues). Il propose au grand public, avec les dessins du second, né en 1990, une analyse des formes de reproduction animale. L’album tranche, dans le fond comme dans la forme, par sa simplicité et sa précision narratives et graphiques, avec la toujours plus abondante production de bande dessinée documentaire, singulièrement sur le sexe.
Léo Grasset s’y fait représenter par son frère comme un petit personnage curieusement asexué. Il est vrai, rappelle-t-il, que l’apparition des mâles et des femelles est postérieure à l’apparition du "vrai sexe", qu’il définit comme "[l]a mise en commun de l’identité de deux individus… qui en produit un troisième, différent". Le mot "sexe" recouvre de nombreuses notions distinctes (organes sexuels, genre, accouplement, échange de gènes…) qui, pour les humains, vont ensemble, complète-t-il, alors que, "pour de nombreuses espèces, ce n’est pas le cas".
Etendant à la biologie le champ de la bande dessinée, Léo et Colas Grasset s’intéressent dès lors à l’utilité du sexe, aux formes multiples des organes sexuels ou à la justification de deux sexes distincts, faisant remarquer au passage qu’un champignon assez répandu, Schizophyllum commune, a la particularité d’avoir 28 000 sexes différents ! Le passage en revue des stratégies de reproduction des espèces ne manque ni de poésie, ni d’humour. Mention spéciale à la description de la fécondation chez les Haplochromines, un groupe de poissons dont les mâles doivent susciter chez les femelles le désir de leur pratiquer une forme de fellation afin qu’ils puissent les féconder. Décoiffant ! Fabrice Piault