44 ans. Attachée du livre et des médiathèques en Tunisie.
En poste depuis octobre 2021
Auparavant : dix ans au CNL à différents postes liés au soutien à la traduction ou l'aide aux librairies françaises.
Quelles sont les spécificités de votre territoire ?
La situation économique en Tunisie est difficile. Le livre français importé demeure un produit de luxe. Le réseau des 423 bibliothèques publiques est dense mais peu attractif avec une offre très limitée de livres en langue française. D'où l'importance des 3 médiathèques de l'Institut à Tunis, Sousse et Sfax pour avoir accès à une offre francophone de qualité et contemporaine dans un pays où 52 % de la population est francophone et où 30 % des publications locales sont en langue française (sur environ 1 500 titres par an). Mais le secteur du livre reste dynamique avec une offre inférieure à la demande et une génération d'autrices et d'auteurs très populaires qui écrivent en dialecte tunisien.
Quels sont les projets les plus importants que vous ayez portés jusqu'ici ?
Les États généraux du livre en langue française dans le monde et le Congrès mondial des écrivains de langue française en septembre 2021 d'abord, deux occasions exceptionnelles de rassembler l'ensemble des acteurs du livre du monde francophone et qui ont donné lieu à une feuille de route partagée. J'ai également pu suivre le programme Livres des deux rives dès ses débuts en 2021 avec l'Institut français. Ce projet vise à soutenir le dialogue entre les sociétés civiles des rives nord et sud de la Méditerranée par des actions de coopération autour du livre. Avec le focus Tunisie du festival Étonnants Voyageurs en juin 2022, l'IFT a accompagné 13 auteurs, cinéastes et journalistes tunisiens qui ont ainsi pu dialoguer avec plus de 150 invités internationaux. La francophonie au féminin était à l'honneur à l'IFT en mai dernier où une dizaine d'écrivaines francophones (Cameroun, Canada, France, France-Martinique, Liban, Tunisie, Turquie) ont été réunies autour du Parlement des écrivaines francophones. Enfin l'ambitieux projet Massari, un programme de formations qualifiantes sur deux ans (2023-2025) pour tous les acteurs culturels en Tunisie, dont ceux du livre évidemment.
Qu'attendez-vous des professionnels du livre en France ?
Plus de curiosité, d'intérêt et de compréhension des « marchés » francophones du Sud et des spécificités de chaque territoire pour adapter le montant des cessions, des droits d'auteur, qu'ils sachent s'adresser d'une façon égalitaire aux éditeurs locaux. Que les professionnels du livre français voient ces marchés comme des espaces d'échange et de circulation des idées et des savoirs et un soutien à la professionnalisation, comme avec le programme Massari. Je salue l'initiative du Bief cette année d'avoir accueilli des éditeurs maghrébins pour vendre leurs droits au Paris Book Market. Enfin, une présence même symbolique des éditeurs français aux salons et foires du livre tunisiens serait la bienvenue.