Roman/France 1er mai Emily Barnett

C'étaient des enfants à qui tout était promis. Des adolescents déjà d'autrefois, des années 1990, bonnes études, bonnes familles (pour la plupart), à fleur d'ironie plus que de peau, avec des avis et de l'avenir, ironie de circonstance puisqu'ils en ont les moyens. L'éternelle histoire d'une génération en somme, ni mieux ni moins bien que celle qui l'a précédée et celle qui la suivra Une jeunesse à Paris, qui se dirige sans le savoir vers le massacre.

Vendredi 13 novembre 2015, 21h30. Juliette, la trentaine urbaine, précaire et sûre d'elle, fait du vélo vers la rue du Faubourg-du-Temple. Dans la nuit qui tombe, flotte soudain comme un air d'inédit, de désastre. Elle ne le sait pas encore, mais voici pour elle venue l'heure du rendez-vous avec ses fantômes. Du côté du bistrot le Carillon, des gyrophares, des rumeurs de fusillades, des corps, certains suppliciés, d'autres comme hébétés. Et l'un d'eux, blessé peut-être, qui lui dit quelque chose (une cigarette ? un regard ?). C'est Paul. Paul, le « gauchiste » si drôle des années lycée, de sa bande, de cet âge où semblait infini le champ des possibles. Paul dans sa nuit désormais, que Juliette va devoir traverser avec lui, convoquant peu à peu comme autant de fantômes qu'elle redécouvre familiers. Parmi eux, Diane, astre éteint prématurément de leur jeunesse. Diane qui ne se laisse pas oublier et que le désastre ambiant leur rend dans tout l'éclat de ses égarements et de leur chagrin.

Avec son premier roman, Mary (Rivages, 2015), Emily Barnett offrait un « dispositif » littéraire flirtant avec les codes de la littérature de genre. Si le talent demeure, les masques tombent avec ces Oiseaux de passage qui ne se payent plus de mots, mais déjà que de mélancolie. L'heure n'est plus au performatif, mais à la narration la plus simple du vide et de la perte. Le 13 novembre est une horreur, l'horreur d'une profonde nuit, et toute jeunesse, erreur magnifique. Il y a des façons moins simplement élégantes de l'écrire que ne le fait ici, le cœur lourd, Emily Barnett.

Emily Barnett
Les oiseaux de passage
Flammarion
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 17 euros ; 190 p.
ISBN: 9782081481398

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