Ces temps de vaches maigres pour le livre, contraint tout à la fois par les tensions économiques et les passions électorales, sont propices au travail de renouvellement des catalogues. A quatre mois de la rentrée littéraire, l'enquête approfondie proposée par Bertrand Legendre et Corinne Abensour sur les premiers romans et les primo-romanciers, Entrer en littérature (Arkhê), apporte à cet égard à tous les maillons de la chaîne du livre des informations précieuses. Elle dessine les contours d'un concept au départ essentiellement médiatique ; restitue des stratégies et des trajectoires individuelles et collectives ; souligne les enjeux d'une relation auteur-éditeur moins dégradée qu'on ne le croit souvent et s'interroge sur l'après, le deuxième roman, et même les autres qui pourraient suivre. Son intérêt n'est pas seulement sociologique : en une vingtaine d'années, le prix Goncourt est revenu quatre fois à un premier roman, qui a ainsi pu enregistrer un score de vente à six chiffres. Et d'autres encore de ces coups d'essai touchent chaque année plusieurs milliers, voire plusieurs dizaines de milliers de lecteurs.
Ecrire n'est pourtant pas une sinécure, comme en témoigne le cas de François Garcia, dont nous dressons le portrait à l'occasion de la parution de son troisième roman. Ce médecin homéopathe et acupuncteur est trop épuisé pour écrire le soir, dans le prolongement de sa journée de consultations. Aussi se relève-t-il la nuit pour prendre des notes, avant de noircir ses carnets au petit matin à la table d'un café. Mais son profil atypique ne le rattache pas à l'une des quatre principales catégories d'auteurs (enseignants et chercheurs, artistes et professionnels du spectacle, professionnels du livre, professionnels de la communication) distinguées par Bertrand Legendre et Corinne Abensour parmi les primo-romanciers, et qui assurent 60 % de la production de premiers romans. Avant de se tourner vers la médecine, il a même été, pendant dix ans, torero. Olé !