Rentrée universitaire

L'effet Parcoursup

Maison des examens, Arcueil. - Photo Olivier Dion

L'effet Parcoursup

Un an après l'entrée en vigueur du système Parcoursup, les éditeurs universitaires adaptent leur production à la nouvelle plateforme d'affectation des vœux des étudiants. Sur un marché toujours orienté à la baisse, ils multiplient les titres ouvertement double-cible._ par

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Par Charles Knappek
Créé le 05.09.2019 à 22h03

A force de parler du désintérêt croissant des étudiants pour le livre, de la baisse générale du niveau et du lancement régulier de collections conçues pour pallier l'absence ou la trop faible culture des bacheliers, il était fatal que l'organisation même de l'accès aux études supérieures s'en ressente. L'instauration l'an dernier de Parcoursup, qui introduit des prérequis à l'entrée dans les filières du supérieur et de nouvelles règles de candidature, ne fait qu'entériner un processus engagé depuis plusieurs années dans l'édition universitaire : tout est fait pour accompagner les étudiants et éviter leur décrochage en première année de licence où le taux moyen d'échec voisine avec les 60 %.

Manon Savoye, Ellipses.- Photo OLIVIER DION

Nouveaux besoins

La réponse « oui-si » à Parcoursup illustre plus que toute autre la volonté de ne laisser personne sur le bord de la route. Elle permet à un bachelier trop juste sur les prérequis d'être accepté dans la formation de son choix à condition de suivre un parcours adapté à son profil (remise à niveau, soutien, tutorat...). 145 000 élèves ont bénéficié de ce programme l'an dernier, même s'il est loin d'avoir été généralisé, faute de moyens. Fin juin, plus de 200 000 propositions d'admission « oui-si » avaient déjà été formulées sur Parcoursup en vue de l'année 2019-2020. En théorie, les étudiants accèdent désormais à une licence transformée, personnalisée, modulable en plus ou moins trois ans et prenant mieux en compte leur parcours et leurs souhaits.

Martine Pierrard, Dunod.- Photo OLIVIER DION

Les éditeurs ont une carte à jouer. « Après les tâtonnements de la première année, la vraie mise en œuvre va commencer pour cette rentrée, juge Frédéric Vignaux, directeur de Studyrama. Les facs se sont organisées pour proposer des cours de soutien et cela crée de nouveaux besoins. » C'est dans cette optique que Studyrama publie début septembre Parcoursup, oui si... : réussir son intégration dans l'enseignement supérieur.

Fanny Bouteiller, Puf.- Photo OLIVIER DION

L'éditeur est loin d'être le seul et, au-delà du cas particulier des « oui-si », un grand nombre de titres proposent de la remise à niveau dans diverses matières fondamentales, voire à destination de filières particulières. De Boeck vient d'inaugurer la collection « Parcours Réussite » avec six premiers titres dont Bien commencer en Staps ou Physique : tout pour bien commencer ma licence. Le premier opus de la collection paru le 12 juin s'intitule Je réussis mon entrée en fac et propose de décrypter Parcoursup à travers le témoignage de plus de 360 étudiants. Dans une optique ludique, Bréal a complété cet été sa collection de cahiers de vacances avec trois nouveautés consacrées aux Staps, la culture générale et la psycho.

Hélène Jean-Baptiste- Photo OLIVIER DION

Plus classiquement aux Puf, Optimiser son score au certificat Voltaire figure parmi les meilleures ventes et fera l'objet d'une nouvelle édition en octobre. De la même manière, Ellipses propose un large choix d'ouvrages revenant sur les bases de la grammaire et de l'orthographe. « Beaucoup de professeurs nous disent consacrer une part importante de leurs cours à de la remise à niveau en français, confirme Manon Savoye, directrice éditoriale chez Ellipses. Nous en tenons compte dans notre production. »

Filières prisées

Ce sont les filières prisées qui inspirent le plus de parutions nouvelles, en particulier les études infirmières et paramédicales. Dunod, Foucher, Lamarre, Studyrama ou Vuibert se positionnent tous avec des titres conçus pour préparer l'entrée en Institut de formation en soins infirmiers (Ifsi), voire dans des filières plus réduites comme les établissements de formation en travail social (EFTS) ou les écoles d'orthophonie.

D'autres collections lancées dernièrement ont anticipé le mouvement sur des thématiques plus poussées. Chez Dunod et Armand Colin, au moins deux collections correspondent par leur positionnement au profil des « oui-si » de Parcoursup. « Portail », inaugurée en 2016 chez Armand Colin, a dès l'origine été conçue pour aider les « primo-étudiants » à entrer dans le catalogue de l'éditeur. De la même manière, sous la marque Dunod, la collection de manuels visuels « Fluoresciences » créée en 2017 s'est positionnée comme celle des « prérequis ». « Nous ne déployons pas de nouvelle collection pour aider les lycéens à réussir leurs premiers pas dans le supérieur car c'est précisément ce que proposent déjà "Portail" et "Fluoresciences" », confirme Martine Pierrard, responsable communication et marketing chez Dunod et Armand Colin.

Au bout de trois ans d'existence, « Portail » commence à bénéficier d'un peu de prescription, en particulier pour ses ouvrages dédiés à la psychologie ou à l'histoire, et s'étoffe cette année d'une nouveauté consacrée à la géopolitique.

De son côté « Fluoresciences » étend à six le nombre de ses références avec Géologie, paru ce mois de septembre. Surtout, la collection s'est enrichie d'une sous-série de cours avec exemples concrets, QCM et exercices corrigés, dont les deux premiers opus sont parus en mai : Electromagnétisme et Biochimie. « Il s'agit de titres plus sélectifs, au contenu original mais plus ramassé, précise Martine Pierrard. Ils permettent de répondre à un besoin ciblé et sont proposés à 19,90 euros contre 27 euros pour les titres classiques de la collection. »

En réalité, plus personne ne néglige la question de l'accessibilité des ouvrages, ce qui se traduit par une meilleure prise en compte de la dimension pratique des enseignements. Aux Puf, le tome 2 de Méthodologie philosophique intègre ainsi beaucoup plus de corrigés, de dissertations et d'explications de texte que le premier tome. Le titre répond au « réel besoin des étudiants d'avoir une feuille de route pour affronter et dédramatiser les exercices difficiles que sont la dissertation et l'explication de textes en philosophie », explique Fanny Bouteiller, responsable d'édition manuels universitaires aux Puf.

De même, chez Hachette Supérieur, la collection « Objectif BTS Toutes les matières » a été enrichie de trois nouveaux titres, dont le BTS MUC et les deux BTS réformés BTS SAM et BTS GPME. « Nous avons été l'unique éditeur à proposer des ouvrages parascolaires pour les deux filières dès leur entrée en vigueur, souligne Stéphanie Jouzier, responsable éditoriale licences, enseignement technique, supérieur et concours chez Hachette Supérieur. Cela nous a permis de répondre aux attentes des enseignants en quête de contenus conformes aux nouveaux programmes. » Les titres proposent également un accès à de nombreux tutoriels vidéo via la chaîne YouTube « Objectif BTS Hachette » pour améliorer l'expression écrite - c'est une exigence des nouveaux programmes - et comprendre les notions clés du programme.

Une autre manière de capter le lectorat étudiant est de lui proposer des ouvrages à vocation fortement professionnalisante. C'est la stratégie de Pearson avec des livres comme Métamorphose du manager à l'heure du numérique ou Distribution 4.0. « Les étudiants veulent apprendre en faisant. Le lien avec le monde professionnel est de plus en plus important pour eux », souligne Hélène Jean-Baptiste, responsable enseignement supérieur.

Bonne tenue de la référence

Au-delà des formats courts ou plus accessibles et des titres surfant sur l'actualité Parcoursup, il faut tout de même noter la bonne tenue des gros ouvrages de référence, en croissance, alors que les titres de révision/entraînement et les manuels spécialisés ont cédé du terrain au cours de la dernière année.

« Les bibles tirent vraiment leur épingle du jeu, elles constituent un axe important de développement pour nous », confie Gwénaëlle Painvin, directrice de Vuibert. Après avoir lancé l'an dernier au sein de sa grande collection blanche « Vuibert Gestion » un Communication et un Finances d'entreprise, l'éditeur poursuit son offensive avec Management. Vuibert en profite aussi pour publier la 17e édition de son long-seller Ressources humaines, alias le « Peretti ». Plusieurs de ces titres, dont pour la première fois le « Peretti », bénéficient d'une couverture originale conçue pour améliorer leur attractivité en librairie.

Chez Dunod les « Livres en or » se sont enrichis en mars d'un Negociator, déjà écoulé à plus de 2 000 exemplaires. Fin août, l'éditeur a publié la 8e édition du Strategor.

Chez Pearson, le gros enjeu se nomme Marketing management, le « Kotler », paru le 21 juin. « Nous avons opté pour une nouvelle maquette, un nouveau format et beaucoup de nouveaux cas d'introduction de chapitres dédiés aux marques et aux entreprises en pleine croissance et porteuses d'innovation », explique Hélène Jean-Baptiste.

L'ensemble de ces ouvrages propose presque toujours des compléments numériques, dont l'utilisation est très variable. « C'est important de proposer ces compléments à nos lecteurs désireux de jongler entre le papier et le numérique. En pratique, on observe un usage encore modeste de ces fonctionnalités », précise Gwénaëlle Painvin.

Projets ambitieux

Même en sciences humaines, certains éditeurs n'hésitent pas à publier de gros manuels de référence, tels Ellipses avec Les mondes romains : questions d'archéologie et d'histoire, pavé de 720 pages annoncé pour la rentrée. « Quand nous pouvons nous appuyer sur une équipe pédagogique qui développe les enseignements et s'appuie sur la prescription, nous n'hésitons pas à nous lancer dans ce genre de projets très ambitieux », souligne Manon Savoye. Les Puf, elles, ont publié fin août Economie internationale, qui est l'une de leurs nouveautés phares de la rentrée, et Hachette Supérieur a enrichi en juin sa collection de référence « HU Histoire » d'une ambitieuse Histoire culturelle du Moyen Age en Occident.

Ruée vers les études d'infirmières

La filière infirmière a battu des records de demandes sur Parcoursup. L'essentiel des nouveautés se concentre sur la maîtrise des prérequis nécessaires pour entrer en Ifsi.

Nathalie Théret- Photo OLIVIER DION

Malgré des conditions de travail difficiles et une image dégradée, le métier d'infirmier attire plus que jamais les bacheliers. Arrivée en tête des choix sur Parcoursup (9,6 % des vœux exprimés), la formation n'a pas souffert de la suppression du concours d'entrée aux Instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi)... contrairement aux éditeurs qui trouvaient dans le concours l'un de leurs principaux relais de croissance. « Universitérisation » oblige, de nombreux titres voient le jour pour assurer le lien entre le lycée et l'entrée en Ifsi. Il s'agit d'aider les étudiants à maîtriser l'ensemble des prérequis exigés pour espérer être sélectionnés (seulement 31 000 places par an).

Antoine du Besset, Elsevier-Masson.- Photo OLIVIER DION

Réussir la première année

Pour cette rentrée 2019, Lamarre lance par exemple une nouvelle collection « Objectif intégration Ifsi via Parcoursup ». « Il s'agit de montrer aux étudiants tout ce qu'ils doivent savoir pour réussir leur première année, indique Peggy Lemaire, responsable éditoriale. Nos trois premiers titres portent sur les mathématiques, sur la culture sanitaire et sociale et enfin sur les connaissances, compétences et comportements à maîtriser dès la première année et au-delà tout au long du parcours, stages compris. »

De son côté Foucher s'appuie sur la série « Réussite Parcoursup », dont les titres dispensent des conseils pour optimiser sa candidature tout en proposant une synthèse des prérequis à maîtriser en biologie, calcul et français. L'éditeur complète son offre avec un cahier de l'infirmier dédié au calcul de dose dans la collection « Diplôme d'Etat infirmier ». L'ouvrage propose de revoir « ce qu'il faut savoir pour réussir sa première année ». « Il ne faut pas se leurrer, la disparition du concours ne signifie pas celle de la sélection, précise Nathalie Théret, directrice du département Foucher chez Hatier. La différence, c'est que maintenant les étudiants sont sélectionnés sans entretien. C'est beaucoup plus opaque, les candidats sont donc à la recherche d'ouvrages qui les aident à améliorer leur dossier. »

Attachés au papier

Elsevier-Masson renforce pour sa part la collection d'ouvrages à spirales « Bonnes pratiques infirmières en fiches », inaugurée l'an dernier et qui allie pratique et théorie. La série s'enrichit en septembre d'une nouveauté intitulée Pneumologie : bien débuter. L'éditeur a aussi déployé en juin une nouvelle collection « Les cahiers infirmiers » sur la base de titres déjà présents dans son catalogue. « Les études montrent que les étudiants en médecine et soins infirmiers restent très attachés au papier, analyse Antoine du Besset, directeur du département éducation chez Elsevier-Masson. Il faut se montrer inventif pour bien présenter les sujets. Ils sont sensibles à la créativité éditoriale. »

La création en 2018 d'un diplôme d'Etat infirmier en pratique avancée donne également lieu à quelques nouveautés. Vuibert annonce pour octobre Guide de l'infirmier en pratique avancée. « Les premiers infirmiers en pratique avancée seront en exercice à partir de 2020. précise Gwénaëlle Painvin, directrice de Vuibert. L'objectif est la formation de plus d'un millier de ces infirmiers d'ici 2021. » Sur un terrain voisin, Foucher a publié fin mai Infirmier de bloc opératoire, destiné aux infirmiers exerçant en bloc opératoire sans le diplôme Ibode qui doivent se conformer depuis le 1er juillet à la nouvelle réglementation pour continuer à exercer leur activité.

Valeurs sûres

Enfin, les éditeurs ne négligent pas les valeurs sûres de leur fonds. La nouvelle édition du Précis d'anatomie et physiologie humaines, le « Lacombe », marquera le temps fort de l'année pour Lamarre. D'autant plus que le titre s'enrichit pour la première fois de QCM et d'exercices d'auto-évaluation en ligne.

Chez Pearson, la parution l'an dernier de la nouvelle édition d'Anatomie et physiologie humaines, le « Marieb », enrichie de 335 QCM avec leurs corrigés et de compléments numériques, a permis à l'éditeur de maintenir ses positions sur un marché toujours aussi concurrentiel.

La médecine retrouve la santé

Portée par les ECN, la médecine universitaire s'apprête à vivre une année de transition avant la disparition du numerus clausus, de la Paces, et une nouvelle réforme des ECN.

Patrick Fenouil, Lavoisier.- Photo OLIVIER DION

Après une année 2017-2018 en forte baisse, le marché de la médecine universitaire a repris des couleurs et envisage la rentrée avec un certain optimisme. Surtout, la suppression du numerus clausus et celle de la première année commune aux études de santé (Paces), qui devraient disparaître à la rentrée 2020, ouvre d'importantes perspectives aux éditeurs. Il en sera de même s'agissant de la nouvelle réforme des épreuves classantes nationales (ECN), elles aussi appelées à disparaître au profit d'un mode de sélection pour l'internat faisant davantage la part belle à la pratique.

Les éditeurs temporisent

Dans tous les cas, les modalités futures de sélection et d'enseignement ne sont pas encore connues. Les éditeurs temporisent. « Nous sommes dans une année d'attente, on ignore encore comment les choses vont se passer », confirme Brieuc Bénézet, directeur général d'Ellipses.

Cette année, Elsevier-Masson a pu compter sur les bons résultats de sa nouvelle collection « Les fiches ECNi des collèges », dérivée de la collection phare « Les référentiels des collèges » et lancée fin 2018 avec trois premiers titres. Elle sera complétée de cinq nouveautés cet automne. La petite collection « Fiches faciles aux ECNi » déployée avec deux titres fin 2017 a elle aussi trouvé son public. Elle s'enrichit en octobre d'un troisième opus consacré à la lecture critique d'article (LCA). Malgré la disparition prochaine des ECN, Ellipses parie sur la nouvelle collection « Synthesis ECNi », organisée sous forme de « fiches hyper synthétiques, de tableaux et d'arbres décisionnels », selon Brieuc Bénézet. Sept titres sont parus en juillet.

Chez Vuibert, en attendant la réforme, l'accent reste mis sur les ECN à travers plusieurs ouvrages proposés par des candidats bien classés des dernières sessions. L'éditeur espère notamment le maintien dans le nouveau programme de l'épreuve de la LCA. Réussite à la LCA en français-anglais pour le concours ECNi de Théo Pezel figure en effet parmi ses meilleures ventes. En revanche le marché reste difficile pour les collections d'entraînement papier aux ECN qui souffrent de la concurrence des offres numériques étatiques et privées. Chez Elsevier-Masson, « Focus ECNi » et « ECN Intensif » apparaissent d'autant plus en sursis que les ECN tels qu'elles existent depuis la réforme de 2016 vont disparaître.

Surtout présents sur le marché professionnel, John Libbey et ses différentes marques (Arnette, Doin, Pradel) n'ont pas publié de nouveautés universitaires en 2019. Le groupe maintient néanmoins la présence au catalogue de titres de référence ciblant aussi bien les étudiants que les professionnels. La 5e édition d'Urg' de garde (Arnette) parue en mars dernier permet au titre de remporter un succès croissant auprès des internes. En fin d'année ou début 2020, John Libbey publiera quelques nouveautés universitaires sous la marque Doin : Manuel de physiopathologie sera destiné aussi bien à la Paces qu'aux BTS et DUT biologie humaine ; La révolution biotechnologique et la médecine de demain s'adresse aux étudiants plus avancés.

Coulisses

Enfin, côté coulisses, Lavoisier annonce être sorti de la procédure de sauvegarde engagée en 2017. « La situation est saine, nous avons réalisé un bon exercice et nous sommes en train de rembourser nos dettes », indique Patrick Fenouil, le P-DG. L'éditeur confirme le virage annoncé ces dernières années : moins de gros traités et davantage de formats légers moins chers à produire et plus faciles à vendre. L'accent reste mis en particulier sur « Atlas de poche » et « Le livre de l'interne ».

Des collections toujours plus multicibles

Dans les nouvelles collections et les refontes des anciennes, la tendance est au double positionnement étudiant/grand public averti.

Gwenaëlle Painvin, Eyrolles.- Photo OLIVIER DION

Pourquoi réserver à un public étudiant des titres dont les contenus sont aussi susceptibles d'intéresser le grand public cultivé ? L'idée n'est pas neuve : cela fait des années que des éditeurs (les Puf, La Découverte, La Documentation française, CNRS Editions, etc.) ouvrent une partie de leur production à un public non exclusivement universitaire. Il s'agit de séduire aussi bien des étudiants que rebutent les titres de facture trop classique qu'un grand public qui se laisserait séduire par une thématique ou une couverture attrayantes.

Frédéric Vignaux, Studyrama.- Photo OLIVIER DION

Des titres issus de « U »

La tendance séduit un nombre croissant d'acteurs. Armand Colin lance trois nouvelles collections : « Codex », « La lettre et l'idée » et « Les grands manuels ». « Le parti que nous prenons, parce que les étudiants achètent moins de livres et qu'en même temps des titres culturels peuvent intéresser un public motivé, c'est de ne plus limiter certaines thématiques à des collections purement universitaires », décrypte Martine Pierrard, responsable communication et marketing chez Dunod et Armand Colin.

Ainsi, certains titres sont sortis de la mythique mais austère collection « U » d'Armand Colin pour reparaître dans l'une des nouvelles collections. « Codex » propose des manuels pour formation en humanités autour de thématiques comme la littérature, la linguistique, la philosophie ou le théâtre. « La lettre et l'idée » se concentre pour sa part sur l'histoire des idées, de la philosophie ou des sciences humaines. Enfin, « Les grands manuels » est pour le moment dédiée à l'histoire et s'ouvre avec quatre premiers titres. « Les livres de ces nouvelles collections sont moins universitaires d'apparence, leur couverture est très visuelle. Avant, nous les aurions publiés en "U" », poursuit Martine Pierrard. La collection « U » ne disparaît pas pour autant, mais elle n'a plus que vocation à accueillir les ouvrages dont le potentiel grand public est faible.

Côté refonte, les Puf viennent de mettre en fonction la charte intérieure de « Quadrige Manuels ». Le renouvellement avait commencé en mai avec la modernisation des couvertures et de la maquette intérieure de leurs « Précis ». L'opération a démarré avec les meilleures ventes de la collection : Précis d'économie, Précis de sociologie... Les  titres ont été entièrement réécrits pour l'occasion.

Une étude qualitative

Vuibert s'est appuyé sur une étude qualitative menée par l'institut Gatard en mars 2019 auprès de vingt personnes pour moderniser en août la collection « Les essentiels du Sup' », dont la création remonte à 2016. Un effort particulier a porté sur les nouvelles couvertures : « Au lieu d'un mini-sommaire, nous mettons en avant, dès le plat 1, en quoi le livre va être utile au lecteur, explique Gwénaëlle Painvin, directrice de Vuibert. Nous avons compris que c'est un élément majeur pour séduire les étudiants qui ont besoin d'être accompagnés au moment de l'acte d'achat. » Quatre titres sont concernés dans un premier temps par la nouvelle maquette. La collection accueillera aussi quelques nouveautés qui intégreront des synthèses visuelles à la fin de chaque chapitre.

Chez Dunod la collection « Sciences Sup » n'est pas refondue à proprement parler ; elle est plutôt enrichie de plusieurs nouveautés qui, dans leur présentation, ne font plus référence à l'intitulé de la collection et optent pour des couvertures visuelles et des titres décalés. Parmi ces livres on peut citer Maths - 1 350 cm3 d'exercices corrigés pour la Licence 1, paru en janvier dernier, ou Smartphonique - expériences de physique avec un smartphone.

Du côté des poches, Bréal, marque de Studyrama, revoit le concept de la collection « Thèmes & débats » qui adopte un format un peu plus grand. Les premiers titres concernés par la refonte paraissent cet automne et sont dédiés à l'histoire de l'urbanisme, au système financier ou à la dette publique. « La collection intéresse à la fois les étudiants en université et en écoles de commerce », indique Frédéric Vignaux, directeur de Studyrama.

L'expertise-comptable de retour au premier plan

La réforme du programme des études d'expertise-comptable (DCG, DSCG, DET), effective dès cette rentrée universitaire, va relancer un marché structurellement porteur.

Sylvie Ogée, Nathan.- Photo OLIVIER DION

Conçue pour s'adapter aux nouvelles pratiques de la profession et mieux différencier les niveaux licence (DCG) et master (DSCG), la réforme des études d'expertise-comptable met fin à plusieurs années d'attente pour les éditeurs. Elle est même arrivée plus vite que prévu : attendue pour 2020, son entrée en vigueur dès cette rentrée a pris de court Nathan qui n'a pu mettre à jour que trois titres de son catalogue. « Nous procéderons à la mise à jour sur deux ans, annonce Sylvie Ogée, directrice éditoriale. Nous avons mené d'importants chantiers dans le scolaire et nous n'avons pas été en mesure de refondre l'intégralité de notre offre dès cette année. »

« Un enjeu majeur »

Seuls Dunod et Foucher se présentent avec un catalogue entièrement à jour. Pour l'un comme pour l'autre, la réforme représente « un enjeu majeur », selon Martine Pierrard, responsable communication et marketing chez Dunod. Premier à publier ses titres consacrés au DCG début juin, Foucher a également fait de l'expertise-comptable un incontournable de la rentrée. « Paraître en premier constitue toujours un avantage », se félicite Marylise Vérité, responsable éditoriale enseignement supérieur et développement numérique chez Foucher.

Chez Dunod, leader historique du marché, toujours associé à Francis Lefebvre, la réforme se traduit par l'actualisation de ses trois types d'ouvrages (manuels exhaustifs, livres de corrigés et fiches de révision). L'éditeur a modernisé les couvertures et les maquettes intérieures, optant pour une approche plus visuelle de ses contenus. Pour la première fois les titres sont tout en quadri et des pictogrammes apparaissent dans les pages. Autre nouveauté, Dunod propose un livre numérique du professeur qui sera donné à l'enseignant sur justificatif de prescription. « Le livre numérique propose des corrigés et des études de cas pour aider le professeur et l'inciter à aller plus loin, précise Martine Pierrard. Ce sont nos délégués pédagogiques qui remettront le lien contre un justificatif de prescription. »

De son côté, fort de ses tout-en-un dédiés au DCG parus en juin, Foucher a complété son offre cet été avec les ouvrages de révision avant de couvrir le DSCG à l'automne. « Nous avons intégré tous les corrigés dans les ouvrages, les maquettes ont été entièrement revues et nous avons ajouté des synthèses à la fin des cours, indique Marylise Vérité. Nous avons tenu compte des besoins des étudiants : disposer des exercices à proximité du cours les aide beaucoup dans leur travail de révision et d'apprentissage. »

Sketchnotes

Chez Vuibert, la réforme offre l'occasion de proposer un concept d'ouvrages à l'italienne encore jamais vu en expertise-comptable : de la révision/entraînement sous forme de sketchnotes. Inaugurée avec deux premiers titres consacrés au DCG 4 et 9 (droit fiscal et comptabilité), la collection « Visuel DCG » sera enrichie de nouveaux opus courant 2020. Chaque titre contient 80 fiches organisées en double page (texte à gauche, sketchnote à droite) et s'achève sur une série d'exercices corrigés. « Ce format sketchnote est inédit en expertise-comptable. Il s'agit d'être impactant pour aider à la mémorisation », souligne Gwénaëlle Painvin, directrice de Vuibert. L'éditeur n'a pas encore mis à jour ses ouvrages de cours. « Nous allons observer comment se comporte le marché cette année et nous nous déciderons en conséquence pour la rentrée prochaine », conclut Gwénaëlle Painvin.

Gualino reste présent à travers ses collections de fiches de cours et d'entraînement « Carré DCG » et « Carré DSCG », toutes deux à jour de la réforme avec leurs titres parus en août. Enfin, challenger sur le marché, Ellipses aborde la rentrée avec trois titres couvrant une partie du programme du DSCG. L'éditeur n'a pas encore actualisé la collection « Réussir le DCG » qu'il avait lancée à la rentrée 2017.

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