Après Nicolas de Crécy, Marc-Antoine Mathieu et cinq autres auteurs de bandes dessinées, Bilal propose à son tour une vision personnelle du Louvre dans la collection bâtie par Futuropolis avec le célèbre musée. Pour le dessinateur et peintre, on y respire du fantôme "à chaque coin de galerie, dans chaque parcelle d'oeuvre, dans tout ce que les yeux touchent [...], dans tout l'air qui colle aux plafonds". Et de livrer avec une malice bienvenue 22 portraits de ces spectres qu'il a vus surgir au travers d'autant d'oeuvres - sculptures et peintures en particulier - qu'il a soigneusement photographiées et répertoriées, de la Victoire de Samothrace au fameux Portrait présumé de Gabrielle d'Estrées et de sa soeur la duchesse de Villars (Ecole de Fontainebleau, fin du XVIe siècle), en passant par le Code babylonien de Hammurabi, la Jeune orpheline au cimetière (Delacroix), un détail de Marchands de poissons à leur étal (d'après Frans Snyders), ou bien sûr la célèbre Joconde.
Travaillant à l'acrylique et au pastel sur ses photos "légèrement désaturées" et tirées sur toile, Bilal donne de chacun de ses fantômes une représentation généralement édifiante, qui les montre portant l'angoisse et la douleur infinies et indicibles qui sont peut-être celles du créateur de l'oeuvre, ou les siennes propres. Chacune est éclairée par une biographie synthétique et dramatique, très librement connectée à l'histoire établie, qui retrace la trajectoire d'Aloysias Alevratos, Hécube ou Analia Avellaneda. Systématiquement tragique.