9 novembre > Littérature France > Blaise Cendrars

Après la publication de ses Œuvres complètes, en XV volumes, de 2001 à 2006 chez Denoël, sous la direction, déjà, de Claude Leroy, on pouvait penser que Blaise Cendrars (1887-1961) ne ferait jamais son entrée au panthéon de la "Bibliothèque de la Pléiade". C’eût été une injustice et une erreur, compte tenu de l’importance et de la popularité de son œuvre - du moins certains titres, comme L’or (1925), Moravagine (1926) ou Bourlinguer (1948) -, et du statut de son auteur, l’un des écrivains les plus novateurs du XXe siècle. L’homme non plus n’est pas inintéressant, ce Frédéric-Louis Sauser dit Freddy, aventurier suisse qui a vécu une jeunesse particulièrement rocambolesque, avant de devenir, en 1912, écrivain français sous le pseudonyme de Blaise Cendrars, combattant dès octobre 1914, blessé en 1915 et amputé du bras droit, naturalisé en 1916, puis de faire son œuvre. De la main gauche. L’autre, il l’appelait sa "main fantôme", et il en a souffert toute sa vie.

Cendrars est l’auteur d’une œuvre abondante, diverse, et redoutablement compliquée à éditer. A présenter, surtout, tant l’écrivain s’est ingénié à brouiller les pistes, fabuler, s’inventer des voyages puis les raconter et les assumer avec aplomb, et à se moquer absolument "des genres et des catégories littéraires" traditionnels. Il le déclare en 1924, dans une conférence, se revendiquant avant tout moderne, et allant même jusqu’à affirmer : "Nous ne faisons plus de la littérature." Plutôt seulement de la littérature, plus des romans, ni des poèmes. Dès 1917 ou 1924, d’ailleurs, selon ses dires, il avait cessé d’écrire de la poésie, au sens commun du terme. Comment, donc, mettre de l’ordre dans le "prodigieux désordre" de sa création ?

La "Pléiade" avait commencé, en 2013, avec les deux volumes de ses Œuvres autobiographiques complètes - mais tout, chez Cendrars, n’est-il pas autobiographique ? - et poursuit aujourd’hui, avec deux volumes, à l’architecture complexe, des Œuvres romanesques précédées des Poésies complètes, suivant un déroulé chronologique. Le premier rassemble les poèmes de Cendrars, dont la fameuse Prose du Transsibérien, mais sans leurs illustrations, suivis de ses romans publiés de 1917 à 1929. Le second, ses romans parus de 1930 à 1957, suivis de "textes épars", comme L’argent, un projet de roman des années 1934-1935 dont il n’a écrit que le premier chapitre. Les grands titres bénéficient en outre de "dossiers", avec des textes rares ou inédits.

C’est la remise en lumière passionnante d’une œuvre majeure, avec son ordonnancement, comme l’écrit Claude Leroy, en "trompe-l’œil". J.-C. P.

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