La vulgarisation scientifique passe bien mieux quand on y met de l’humour. Léo Grasset l’a très bien compris et c’est ce qui rend son livre sur ses Savants dans la savane si savoureux. En quinze chapitres fort bien troussés, il nous entraîne dans le monde de l’évolution, de l’éthologie, du comportement animal et du sens de la vie. Les questions peuvent paraître saugrenues, les réponses s’avèrent toujours inattendues. Pourquoi les girafes ont-elles un long cou ? - pas seulement pour manger les feuilles les plus hautes, d’où le jeu de mots entre cou et coup… Pourquoi est-il impossible de distinguer à l’œil nu le clitoris d’une hyène d’un pénis ? Pourquoi la gazelle change- t-elle brutalement de trajectoire vis-à-vis d’un prédateur ? Quelle est la fonction des rayures du zèbre ? Existe-t-il une forme de démocratie chez les buffles ? Comment les éléphants transmettent-ils des messages sismiques ? Ou pourquoi devriez-vous frémir à l’évocation du mustélidé vengeur appelé ratel ?
Spécialiste de l’impact des écosystèmes sur les sociétés humaines, Léo Grasset a longtemps observé la faune sur le terrain, au Zimbabwe. Pour ce biologiste, dont on retrouve les chroniques malicieuses sur la chaîne YouTube DirtyBiology, "les savanes sont des écosystèmes particulièrement adaptés pour une réflexion sur les multiples interactions qui existent entre notre espèce et les autres".
L’observation des animaux nous en dit long sur notre comportement, sur les notions de hasard, de nécessité et sur le bricolage permanent de l’évolution. Aux frontières de la recherche scientifique, Léo Grasset ouvre des perspectives audacieuses, par exemple sur les bousiers qui ont besoin de la Voie lactée. Il révèle aussi combien la nature a encore des choses à nous apprendre, pour peu qu’on prenne le temps de l’observer et de s’émerveiller de ses subterfuges. En matière de biologie évolutive, voilà donc un jeune auteur clair, intuitif, rigoureux et malin, qui devrait être un intercesseur subtil entre ceux qui savent et ceux qui ont envie de savoir. En tout cas, il a réussi un vrai livre d’histoires naturelles ! Laurent Lemire