6 mars > Essai France > Maryline Desbiolles

Maryline Desbiolles ne va pas être la seule à s’intéresser à Rodin en cette année 2017 où l’on célèbre le centenaire de sa mort, mais son Avec Rodin exprime assurément une manière de voir le sculpteur originale et radicalement personnelle. Comme souvent dans ses livres, l’auteure d’Anchise (prix Femina 1999), dont c’est loin d’être la première incursion dans le monde de l’art et de la création (Les draps du peintre, Vallotton est inadmissible, plus récemment Le beau temps sur le compositeur niçois Maurice Jaubert ou le recueil Ecrits pour voir (L’Atelier contemporain)), annonce d’emblée d’où elle parle. "J’écris depuis l’atelier du sculpteur qui partage ma vie, j’écris depuis l’atelier, un peu à côté, à peine". Celui qu’elle entend travailler de son bureau dans leur maison de l’arrière-pays niçois est Bernard Pagès qu’elle ne nomme pas autrement dans le récit que comme "le sculpteur avec qui je vis" ou "le sculpteur que je connais".

Maryline Desbiolles n’est pas biographe, ni historienne de l’art, ni critique, pas écrivaine d’autofiction non plus mais, en même temps, elle est un peu tout ça. Avec Rodin est une expérience de "compagnonnage". L’écrivaine emboîte le pas du sculpteur. Et on le voit avec elle. En modeleur, déconstructeur, assembleur, artiste sans autre outil que la terre et le crayon, ivre de "plein air" dont l’observation maniaque des arbres et des nuages avec celle des corps des modèles a été la principale école. Regarder Rodin, animé d’une "ardeur lente", ses œuvres - son "admirable Balzac" au carrefour Vavin -, ses amours, ses amis, ses détracteurs. Avec Rodin n’est pas un exercice de célébration mais un essai d’élucidation de sa "méthode". S’ajoute à l’expertise de l’écrivaine, nourrie de l’enquête et de la documentation, le regard familier, le parti pris (ses préférences, ses interprétations, les hypothèses qu’elle imagine) emporté dans un récit cinétique, toujours en mouvement, dansant autour des corps. Au plus près du "nid des choses", comme disait Rodin qui, observe l’écrivaine qui a hésité à donner ce titre à son livre, "ne parle pas du cœur des choses, si abstrait, mais du nid confectionné avec la main dans la terre ou la mie de pain". V. R.

17.02 2017

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