Matt Lennox est un solide gaillard qui a vu le jour en Ontario en 1980. Après un recueil de nouvelles pas encore traduit, Men of salt, men of earth, il s’est imposé avec un premier roman très réussi, ce Rédemption à paraître dans la collection "Terres d’Amérique" d’Albin Michel.
Le talentueux débutant situe son action en 1980. Charpentier et menuisier, Leland King a passé dix-sept ans derrière les barreaux. L’homme qui se dit coupable de tout ce pour quoi on l’a condamné et qui ne boit plus une goutte d’alcool revient dans la ville de son enfance, dans l’Ontario, près du lac Kissinaw. Le héros de Matt Lennox a un bagage léger : un portefeuille, une valise, des cigarettes et un briquet en plastique.
Le voici qui s’installe au-dessus d’une supérette, dans un studio que lui a trouvé son beau-frère, le pasteur Barry. Lee retrouve sa mère, Irene, atteinte d’un cancer du poumon, et sa sœur, Donna, dont le fils aîné, Pete, a arrêté le lycée pour travailler dans une station-service Texaco sur la rocade.
Notre homme doit rencontrer toutes les six semaines son agent de libération conditionnelle. Il attrape des courbatures à hisser des piles de bardeaux, envisage d’acheter un téléviseur, se voit surnommer "Œil-de-velours" par l’accorte serveuse de l’Owl Café où il a ses habitudes et prend son petit-déjeuner…
Rédemption tisse lentement sa toile, installe minutieusement un décor et une atmosphère. Dans les parages, on trouve aussi Stan Maitland, un veuf, ancien de la police locale en retraite depuis huit ans, qui garde la forme et emmène pêcher sa petite-fille. Stan vient de découvrir le cadavre d’une jeune femme morte dans sa voiture. Judy Lacroix, dont on pourrait croire qu’elle s’est suicidée, était avec sa sœur jumelle, Ellie, la dernière représentante d’une famille qui a déjà salement morflé…
Déjà très à l’aise narrativement, Matt Lennox laisse remonter les histoires enfouies depuis des lustres, éclater les vieilles rancœurs. Le résultat est à ne pas rater.
Al. F.