Avant de retourner vivre à Londres, Sir Quentin Blake nous a fait l'honneur d'habiter longtemps Royan. Une résidence qui lui a sans doute inspiré Les pieds dans l'eau, laquelle donne son titre au recueil de ses séries (L'art de la conversation, Livraisons venues d'ailleurs, La souris sur un tricycle...), qui paraît chez Gallimard. Dessinateur séquentiel, Blake explore le thème qu'il s'est choisi sous toutes ses facettes, poussant parfois l'humour jusqu'à l'absurde, au nonsense. On pense à la fois à Philippe Delerm pour la simplicité apparente des situations, la tendresse malicieuse, et à Sempé, bien sûr, pour le trait, et ce côté « seul contre tous » qu'expriment ses personnages. Ainsi cette espèce d'hurluberlu juché sur un « bicycoptère » doté d'une queue de cerf-volant constituée de sachets de thé, qui survole les plus hautes montagnes avec un air parfaitement satisfait. Maître du noir et blanc, du croquis, Blake roule depuis toujours à l'économie de moyens. Son trait n'en est que plus efficace, juvénile, indémodable, en dépit de ses 90 ans cette année.

Jenny Uglow retrace, dans un second album, Le livre de Quentin Blake, sa longue carrière, depuis ses premiers dessins dans Punch, en 1948, jusqu'à ses tout récents portraits au stylo à bille, hachurés, presque fantomatiques, en passant par ses couvertures de livres, sa longue collaboration culte avec Roald Dahl, ou encore ses interventions dans l'espace public. À l'origine, Blake aurait pu être un dessinateur académique. À Punch, on a préféré ses croquis. Ils sont devenus son mode d'expression, et lui le plus grand « croquiste » de notre époque.