Partout le feu démarre in medias res, sans majuscule, sans contexte, sans jamais de ponctuation. Cette radicalité déstabilise à bien des égards. L'auteure emploie des retours à la ligne permanents - on pense à Joseph Ponthus -, imposant un rythme en décalage, qui parfois fait buter la lecture, parfois entraîne dans une vague effrénée de dialogues, d'actions drôles, explosives ou pathétiques. Mais qui, toujours, parvient à saisir le lecteur, à l'occasion d'un trait d'humour, d'une image forte ou d'un extrait de paroles musicales.
La narratrice est une antihéroïne à la Daria - ce personnage de la mini-série américaine éponyme, une adolescente blasée, intelligente et sarcastique, à la voix monocorde, qui cache sa sensibilité sous sa misanthropie et son asociabilité. Elle décrit son quotidien amical - avec Fauteur, Balec, la Taupe... - et familial - la rupture est progressive avec Pépou, La Sœur (jumelle, qui ne lui ressemble pas du tout) et son beauf Dans-le-sens-où, qui pensent à l'interner. Sans compter qu'elle doit « faire son deuil » de Mémou. « Fauteur est en face de moi cette fois/ d'une camionnette à l'autre/ on se regarde/ son visage à lui m'encourage/ je pense/ ils ont la police/ on a la peau dure ».
Les personnages sont eux aussi, selon le point de vue, en décalage : des outsiders surdiplômés, qui commencent saisonniers dans une station de ski, et qui finissent suicidés de la société. Ce roman ultra-contemporain donne une vision de l'ère du zapping qui est la nôtre à travers le portrait d'une génération, celle des années 1980-1990.
Partout le feu
Verdier
Tirage: 4 000 ex.
Prix: 16 € ; 160 p.
ISBN: 9782378561284