Autrefois, "sous Charles de Gaulle Ier, qui fonda la Ve dynastie ", comme écrit Patrick Rambaud, il existait dans Le Canard enchaîné une rubrique du regretté Moisan intitulée "La Cour", qui, dans la lignée de Saint-Simon, contait par le menu les faits et gestes de nos hommes politiques, se gaussant de leurs travers. En ces temps-là, il est vrai, les "fenestrons" étaient bien moins nombreux et moins tout-puissants qu’aujourd’hui, et sous contrôle étatique. L’impertinence, la satire, ces deux caractères essentiels de "l’esprit français", nourrissaient une partie de la presse écrite. Ancien journaliste (à Actuel, "gazette underground" dont il est question page 208 de son opus), Rambaud a d’évidence tété le fiel du petit duc et le suc du palmipède.
Après cinq volumes de Chronique du règne de Nicolas Ier ("le Mauvais"), puis une amorce avec Tombeau de Nicolas Ier et avènement de François IV (le tout paru chez Grasset), on se doutait bien que notre mémorialiste n’en resterait pas là. Voici donc le premier volume des (més)aventures de "François le Petit", lequel couvre la première partie de son règne, jusqu’au massacre de Charlie, en janvier 2015.
Dans son style fleuri et rétro inimitable, Rambaud croque notre personnel politique de belle façon. Du plus haut sommet de l’Etat, où trône "Sa Succulence" (dixit Ayrault, duc de Nantes, lorsqu’il croyait encore gouverner en son hôtel de Matignon), jusqu’aux plus humbles grouillots de notre "social ploutocratie", partisans ou adversaires confondus. Rambaud lit tout, sait tout, fort bien informé, et nous régale de quelques épisodes gratinés : Copé et son pain au chocolat, les mensonges de Cahuzac, l’affaire Leonarda, le sinistre Dieudonné… Les historiens du futur vont bien rigoler.
J.-C. P.
