« La première fois que j’ai montré mes livres, c’était à BD Boum en novembre 2019. Je n'avais que quatre ouvrages, autant dire que c’était le tout début », se souvient Frédéric Fourreau fondateur des éditions Patayo. Depuis la création de sa maison d'édition à Nantes en 2019 cet ancien paysagiste de profession confie ne plus avoir les moyens de poursuivre son activité.
« Économiquement, ce n’est plus tenable. L’année dernière, ça allait parce que j’avais eu deux coups de chance : un bon succès en librairie, et, pour quelqu’un qui ne vient pas du milieu, j'avais quand même 50 % de mes livres soutenus par des institutions comme le Centre national du livre, le ministère de la Culture de Taïwan ou du Luxembourg, etc. Mais à un moment, continuer une activité économique qui tient uniquement grâce au soutien public, ça ne peut pas durer. Avant de creuser un trou, je préfère m’arrêter. »
Redonner vie au Lianhuanhua
Le projet des éditions Patayo repose sur le Lianhuanhua, ancêtre de la bande dessinée chinoise, littéralement « images enchaînées », apparu dans les années 1920 à Shanghai. Ce format, qui a connu un immense succès à l’époque, a presque totalement disparu à la fin des années 1980, supplanté par le manga japonais et l’exode des illustrateurs vers des métiers plus rémunérateurs.
« Je trouvais ce format très intéressant pour raconter une histoire, car il y a une séparation entre l’image et le texte. Même les non-lecteurs de BD peuvent s’accrocher au texte avant de passer à l’image », explique Frédéric Fourreau.
Patayo Éditions a développé un petit format singulier : dix centimètres sur quinze, avec une image par page et deux images en vis-à-vis. La maison compte aujourd’hui 19 titres dans ce format, tous de primo-auteurs, une manière de « faire découvrir la bande dessinée à de nouveaux talents ». Initialement la maison proposait cinq parutions par an.
« J’ai sorti trois livres l’année dernière, dont un roman-photo dans ce même petit format », développe Frédéric Fourreau. L'éditeur impose ainsi à ses auteurs un format de 92 cases autour de la thématique suivante : L’extraordinaire dans l’ordinaire. « Et pourtant, chaque livre est unique », se réjouit ce dernier.
Une ouverture internationale
Frédéric Fourreau se réjouit d’avoir travaillé directement avec des auteurs étrangers, notamment de Chine et de Taïwan. Sur son stand, on retrouve une œuvre de l’auteur taïwanais Evergreen Yeh, Lost Gods – Maxa, la Sorcière aux Yeux de Chat, également exposée sur le stand de l’invité d’honneur, Taïwan. « Je l’ai rencontré à Angoulême » explique ce dernier.
Le fondateur de Patayo, qui édite trois auteurs taïwanais, a d'ailleurs vu leurs œuvres rachetées par des éditeurs locaux, une anecdote qui le réjouit tout particulièrement : « Le Lianhuanhua, qui avait disparu sur l'île, est donc revenu grâce à ces auteurs qui ont travaillé pour la maison et je dois dire que cela m’amuse beaucoup. »
L’éditeur a aussi exploré d’autres formats et collections comme « Des cases, des langues, des mondes », convaincu que « la bande dessinée, ce n’est pas juste du texte dans des bulles sur des images. C’est un mariage entre le texte et l’image qui peut être différent à chaque fois. »
Une belle aventure
Au fil de sa carrière, Frédéric Fourreau a partagé sa vision singulière de la BD avec des publics variés : scolaires, retraités, détenus. « Je voulais leur montrer que la BD, avant d’être un ensemble d'images, c’est avant tout une histoire. »
Après le festival SoBD en décembre prochain à Paris, Frédéric Fourreau mettra fin à son aventure éditoriale. « Je garde la possibilité d’être éditeur pour honorer mes contrats avec mes auteurs et liquider les stocks en dépôt-vente. Mais c’était une très belle aventure ! »

