Aux urgences, un cri de détresse transperce une salle. L'équipe médicale semble dépassée. L'obésité de la patiente complique la batterie d'examens. Et si c'était... Non, impossible, la patiente refuse le diagnostic établi.

Surgit alors un étrange jeune homme. Il s'est mis sur son trente-et-un pour ce rendez-vous de la dernière chance. Personne ne l'entend, si ce n'est l'héroïne, perdue dans les limbes de sa douleur. « Je suis rien dans l'esprit de la personne qui me construit. Rien dans son cœur, rien dans sa tête, mais déjà tellement dans son ventre », affirme ce garçon. Il se demande comment entrer en communion avec cette femme, victime d'un déni de grossesse. « Je peux comprendre son rejet. Elle ne s'accepte pas elle-même. » Prisonnière de sa chair, la protagoniste fait partie des 14 % d'adultes atteints d'obésité morbide. Elle abhorre ce corps qui suscite la grossophobie. Comment s'aimer si les autres vous voient comme un monstre, responsable de son sort ?

La Journée mondiale contre l'obésité se tiendra le 4 mars mais la cruauté de notre société obsédée par la minceur s'impose encore. Une réalité à laquelle est confronté le Dr Maxime Sodji, chirurgien digestif et spécialiste de l'obésité. Grâce à l'art-thérapie, ses patientes se dévoilent dans des témoignages, qui complètent la pièce. 1 % d'entre elles ont connu un déni de grossesse.

Pour ériger leurs maux en mots, il a contacté l'audacieuse maison d'édition Black-Out. Celle-ci a choisi la plume d'Alexandre Josse - directeur artistique du Théâtre des Gavroches - un caméléon, dont la sensibilité et l'imaginaire se sont déjà distingués dans des pièces pour enfants ou adultes (Intérimeurtre, Les licornes se cachent pour vomir). Ce nouveau texte se jouera à Brive, Limoges, Bordeaux, Paris.

On sent que l'auteur s'est imprégné du sujet mais il nous amène surtout vers le sens de l'existence. Ce dialogue poignant entre cette femme désespérée et son fils à naître conduit à se demander qui donne la vie à qui. Peu à peu, le lien se noue et laisse éclater la poésie, la fantaisie et la magie de la pièce. La vie, la mort, l'humour et l'amour s'y livrent à une partie de boxe. Qui l'emportera ?

Palpitant, ce texte « rouge vie » d'Alexandre Josse possède l'ardeur d'un défibrillateur. Il nous relie aussi au cordon de l'enfance, qui rejaillit en chacun de nous. Le fils encourage d'ailleurs sa mère à être « une artiste acharnée de [sa] vie » : « Crée, invente, fais, défais, tombe, relève-toi, mais avance... » Il est temps de renaître à nous-mêmes.