Amoureux du Brésil, le journaliste et écrivain Gilles Lapouge est décédé le 31 juillet à l'âge de 97 ans, à Paris, a annoncé sa maison d'édition Albin Michel. "Il est décédé ce matin à l'hôpital américain à Paris", d'une pneumonie, a-t-elle indiqué.
Un peu contre son gré, ce poète-géographe, davantage flâneur qu'aventurier, a longtemps été une figure incontournable du festival Étonnants voyageurs de Saint-Malo. Il est l'auteur d'une trentaine d'ouvrages qui lui ont rapporté une dizaine de prix littéraires, dont le prix des Deux Magots pour La bataille de Wagram (Flammarion, 1987) et le prix Femina essai pour L'encre du voyageur (Albin Michel, 2007).
Une première vie de journaliste
Né en 1923 à Digne (Alpes-de-Haute-Provence), Gilles Lapouge a passé son enfance et sa jeunesse en Algérie. En 1948, il est journaliste à Alger-Républicain, puis devient journaliste économique au grand quotidien brésilien O Estado de Sao Paulo avant de revenir à Paris trois ans plus tard. Il a néanmoins continué à collaborer avec le journal pendant plusieurs décennies. "Le journalisme, que je pratique depuis tant d'années, m'a sauvé de la mauvaise littérature et de l'orgueil", assurait-il.
Il a publié son premier livre, Un soldat en déroute (Casterman, 1963), à 40 ans. De nombreux autres ont suivi : des essais sur la piraterie, les utopies, la géographie, Michel-Ange, l'érotisme ou le sens des voyages, jusqu'à son dernier, un Atlas des paradis perdus (Arthaud, 2017). On lui doit aussi quelques romans comme Les folies Koenigsmark (Albin Michel, 1989), succès public en 1989, L'incendie de Copenhague (Albin Michel, 1995) ou La mission des frontières (Albin Michel, 2002).
Il consacra plusieurs fictions et essais au Brésil, dont en 2011 un Dictionnaire amoureux (Plon) du pays qui l'avait "toujours étonné et surpris, parfois énervé, sans [le] décevoir jamais", en dépit de la violence qu'il ne niait pas. L'ambassade de France au Brésil a d'ailleurs salué vendredi, dans un tweet, la mémoire de "l'amoureux éternel du Brésil".
Une ribambelle de prix
Gilles Lapouge avait échoué de peu au Goncourt avec Équinoxiales (Flammarion, 1977), récit de voyage dans le Nordeste brésilien, ainsi que, dans une moindre mesure, en 1986, avec le roman historique La bataille de Wagram. Mais son œuvre a été couronnée par beaucoup d'autres récompenses : prix des Deux Magots, Joseph-Kessel, Femina de l'essai, Goncourt du récit historique etc. Pour L'âne et l'abeille (Albin Michel, 2014), essai de zoologie comparée, il reçut les prix 30 Millions d'Amis et France Télévisions.
Parallèlement, il a été producteur de l'émission "Agora" de France Culture, et a collaboré au Monde, au Figaro et à La Quinzaine littéraire. Il fut aussi l'une des chevilles ouvrières du lancement, en 1973, de l'émission de télévision "Apostrophes", qui s'appelait alors "Ouvrez les guillemets", présentée par Bernard Pivot.
Ce dernier a salué, sur Twitter, un "grand journaliste et d'un grand écrivain". "J’ai dit, répété que j’aurais voulu écrire avec sa grâce, son humour, sa culture immense et originale, sa manière d’allier des mots qui ne se sont jamais rencontrés", a-t-il rajouté. La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, a, pour sa part, adressé un "au revoir à ce voyageur étonné, grand amoureux du Brésil".