Prix Littéraires

Dans les archives du Goncourt

Pierre Assouline, en bas à doite, lors de la remise du Goncourt 2012 à Jérôme Ferrari. - Photo O. Dion

Dans les archives du Goncourt

Jusqu’au 31 août, Pierre Assouline raconte cent dix ans d’histoire du Goncourt dans une série estivale sur France Culture, qui se prolongera le 17 octobre avec Du côté de chez Drouant : cent dix ans de vie littéraire chez les Goncourt, un livre coédité par Gallimard et la station. Il nous raconte son enquête.

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Par Marie-Christine Imbault
avec Créé le 14.10.2013 à 21h55 ,
Mis à jour le 03.04.2014 à 17h10

La série est également pubiée le dimanche dans le JDD.

Pour le meilleur et pour le prix

Dans La littérature à quel(s) prix ?, à paraître le 29 août à La Découverte, Sylvie Ducas analyse en détail l’histoire et le fonctionnement des prix littéraires. Un prisme pour une investigation sur l’évolution de la vie littéraire.

Sylvie Ducas.- Photo 1001 LIBRAIRIES

Le 6 septembre, l’académie Goncourt donnera le coup d’envoi de la nouvelle saison des prix d’automne (voir calendrier ci-contre). Que chercheront-ils à récompenser, ces Femina, Médicis ou autres Wepler qui, chaque année, collent un bandeau rouge griffé de leur nom sur une petite vingtaine d’ouvrages ? Dans La littérature à quel(s) prix ?, fruit de plus de dix ans d’enquête, Sylvie Ducas revient sur les fondements de ces diverses institutions. Elle rappelle qu’Edmond de Goncourt, par voie testamentaire, peaufinait « les actes d’une mise en scène auctoriale où l’écrivain, vécu comme “fantasme?, est une statue à construire, un monument à édifier, un buste funéraire laissé à la postérité… », tout en assurant, par le rappel de leur nom chaque année dans la presse, « l’immortalité littéraire » des deux frères Goncourt. L’eau, depuis, a coulé sous les ponts. Victime de la phobie du journalisme de son fondateur qui « craignait de voir “l’industrie des lettres? sonner le glas de “la pure littérature? », l’académie Goncourt avait pour but premier, rappelle Sylvie Ducas en en soulignant le paradoxe, « d’atténuer les effets négatifs de l’économie de marché », alors qu’aujourd’hui, poursuit-elle, « elle assoit son pouvoir symbolique sur sa capacité à investir ce même marché, notamment par des tirages considérables que son prix implique ». C’est bien l’une des déviances de tous ces prix qui, au fil du siècle dernier, ont eu à affronter les corruptions d’éditeurs, les pouvoirs des médias, les jurys d’amateurs, pour néanmoins s’imposer avec leur protocole auquel l’écrivain couronné ne comprend pas forcément grand-chose, tant sont en jeu les affinités, le marché, les expertises et tout simplement les mutations des pratiques culturelles et le déclin de la lecture.

Pour le jury Femina, prénommé Vie heureuse jusqu’en 1919, « la chasse au chef-d’œuvre n’existe pas. On lui préfère l’encouragement littéraire, défendu comme un principe fondateur jusqu’en 1913 », écrit Sylvie Ducas, qui rappelle que la revue Vie heureuse a été créée par Louis Hachette, « soucieux d’investir le marché de la presse féminine, tandis qu’il diffuse et rend populaire le roman de gare ». Le Femina inaugure le mécénat d’éditeur en même temps qu’il ouvre le champ aux médias, tandis que les éditeurs cherchent de nouvelles manières de vendre du livre.

Contestation médiatique.

Le journalisme explique d’ailleurs en partie « l’inflation des prix littéraires », analyse encore l’universitaire, en rappelant l’objectif du Renaudot, créé en 1926, ou quatre ans plus tard l’Interallié, d’abord conçu comme un canular : « Dans les années 1960-1970, la contestation médiatique se fait plus virulente, journaux et stations radiophoniques s’érigeant massivement en nouveaux producteurs de la valeur littéraire. Avec eux s’effondre la croyance selon laquelle les écrivains seraient les plus qualifiés pour légiférer dans le domaine de nouveaux talents littéraires ». L’auteure pousse l’analyse jusqu’au grand prix des Lectrices de Elle et au prix du Livre Inter, avec « le constat rassurant d’une répartition équitable des lauriers littéraires entre petits et gros éditeurs », non sans rappeler que les maisons de taille modeste sont dépendantes de gros groupes pour la diffusion ou la distribution : « Les distributeurs restent les véritables maîtres du jeu et les grands gagnants des prix littéraires. » Néanmoins, conclut-elle, ces derniers gardent « leur effet structurant dans le champ littéraire et éditorial » et restent « des accélérateurs de particules » (selon l’expression de Tanguy Viel), même s’il faut toutefois s’interroger sur la façon d’en refaire des machines de guerre de l’écrivain. < M.-C. I.

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