Chères expos

"En cinq ans, les ventes de livres illustrés ont plongé de 50 %. Nous assistons à une réelle rupture, qui n’a plus rien à voir avec la conjoncture." Philippe Monsel, Le Cercle d’art - Photo Olivier Dion

Chères expos

Les catalogues d’expositions permettent aux éditeurs d’art d’éviter la noyade.

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Par Anne-Laure Walter
avec Créé le 01.05.2014 à 20h02 ,
Mis à jour le 23.04.2015 à 10h06

En 2013 encore, la meilleure vente du rayon art est liée à une exposition. Chagall, une vie entre guerre et paix, un album souple de 46 pages à 10 euros, accompagnait l’exposition du musée du Luxembourg, à Paris. Au-delà, sur les 25 meilleures ventes du rayon d’art en 2013 d’après notre palmarès Ipsos/ Livres Hebdo (1), seul Vert : histoire d’une couleur de Michel Pastoureau (Seuil) n’est pas lié à un accrochage. Le podium reste monopolisé par les musées puisque derrière l’album Chagall entre guerre et paix (50 000 exemplaires) publié par la RMN-GP, se trouvent Braque : l’expo (22 500 ventes) chez le même éditeur, et l’album Dali (22 000) édité par le Centre Pompidou.

Les éditeurs d’art traditionnels se polarisent de plus en plus sur ce seul secteur en expansion des catalogues d’expositions, se livrant une féroce compétition pour coéditer avec les musées. En dix ans, la production muséale a doublé, de 309 nouveaux titres en 2003 à 587 en 2013. "Le succès des expositions traduit le besoin de communier dans l’admiration, analyse Philippe Monsel au Cercle d’art. L’émotion déjà forte pendant l’exposition se transforme en pulsion d’achat à la sortie, avec le désir de conserver un souvenir." La belle programmation muséale de l’année à venir (voir encadré) devrait continuer de porter la production éditoriale.

Alors que sa production a augmenté de près de 8 % en 2013 à 5 630 nouveautés et nouvelles éditions d’après nos données Livres Hebdo/Electre, le secteur du beau livre (dont près de 40 % des ventes sont des livres d’art) a vu son chiffre d’affaires baisser simultanément de 3,5 % (source : Livres Hebdo/I+C). Son activité recule plus que la moyenne du marché, à - 1 %. Au dernier trimestre de l’année, crucial dans ce secteur, la baisse des ventes atteint même 5,5 %, faisant de ce rayon la lanterne rouge de la librairie. "En cinq ans, les ventes de livres illustrés ont plongé de 50 %. Nous assistons à une réelle rupture, qui n’a plus rien à voir avec la conjoncture, poursuit Philippe Monsel. Avant, le livre imprimé était le moyen privilégié pour faire circuler une œuvre. Aujourd’hui, l’image est omniprésente, accessible immédiatement en une recherche Google."

A côté des catalogues, d’autres petits segments parviennent à résister, comme le livre d’artiste, mais les éditeurs ne peuvent plus compter sur les ventes au public et cherchent des partenaires financiers. "La mode et le luxe insufflent de l’argent dans le secteur de l’édition ; nous faisons tout pour favoriser ces mécénats en nouant des partenariats avec leurs acteurs, confirme Pascale Le Thorel, présidente du groupe art au Syndicat national de l’édition. Les financements mixtes pénètrent tous les domaines de la culture, le livre ne doit pas passer à côté." <

(1) Ventes isolées dans le classement Beaux livres dans LH 982, du 24.1.2014, p. 28.

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