Au-delà du cas A. Malraux, une proportion importante des bibliothèques municipales porte le nom d'une personnalité souvent de l'écriture ou des musiciens (G. Brassens...). Que penser de cette pratique absente dans les pays anglo-saxons ? La bibliothèque est une institution faite pour durer au-delà du passage d'une génération à une autre. Dans ce cadre, lui donner un nom consiste à contraindre les usagers, présents et à venir, à penser, à célébrer une personnalité passée. Ils n'ont pas le temps de pénétrer dans la bibliothèque que celle-ci leur prescrit déjà leur mémoire ! Entendons-nous, notre société doit composer avec son passé et ne pas le négliger. L'enjeu est celui de la transmission de la mémoire, la construction d'un ensemble de références communes à plusieurs générations. Dans ce cadre, on peut baptiser les écoles et établissements scolaires car ils accueillent un public captif. La venue à l'école est obligatoire et/ou nécessaire pour acquérir un diplôme. Ce n'est pas le cas de la bibliothèque qui a vocation à accueillir une diversité de population   de façon non contrainte. Les usagers, à l'instar de la plupart de nos contemporains, cherchent à écrire leur propre histoire, à adopter des références qu'ils choisissent. Comment être l'auteur de sa propre vie dans la bibliothèque qui m'impose la référence d'une personnalité ? Comment s'approprier un outil marqué du sceau de la révérence au passé ? Au moins à la bibliothèque chaque génération doit pouvoir investir l'espace public de la bibliothèque sans être dans l'ombre de celles qui l'ont précédée ! Chaque génération partage avec les autres le fait d'être citoyen d'une même commune, et les anciennes peuvent avoir la délicatesse de ne pas imposer leur marque aux suivantes ! N'est-ce pas la condition de la créativité ? Célébrons donc le présent et louons la modernité des bibliothèques municipales « anonymes » !
15.10 2013

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