Auteur de polars à succès avec son complice Eric Giacometti, Jacques Ravenne a du talent, du métier et de la technique. C'est donc à la façon d'un thriller qu'il a conçu le présent roman, lequel s'attache à reconstituer minutieusement, en variant les lieux et les points de vue, les deux derniers jours de la vie de Maximilien de Robespierre (1758-1794), les 8 et 9 thermidor de l'an II de la République, soient le samedi 26 et dimanche 27 juillet 1794.
Sous la férule de « l'Incorruptible » et de ses proches, son frère Augustin Bon (surnommé « Bonbon »), Saint-Just, Couthon, efficacement relayés par Fouquier-Tinville, l'accusateur public du Tribunal révolutionnaire, qui dirigent le Comité de sûreté générale, la France est soumise à une véritable et sanglante dictature, celle de la Terreur, avec son cortège d'exécutions arbitraires. La Convention, qui est pourtant censée détenir son pouvoir et sa légitimité du peuple souverain depuis l'exécution du roi Louis XVI en 1793, ne gouverne plus rien, chacun de ses membres tremblant pour sa propre tête s'il venait à s'opposer à Robespierre, ou simplement à déplaire à l'un de ses séides.
Dans ce contexte oppressant, et en pleine canicule, le tyran, par ailleurs tuberculeux et crachant le sang, va commettre une erreur historique : à la tribune de la Convention, le 8, il s'exprime enfin sur ses intentions, après six semaines de silence et de retrait, qui ont permis aux plus folles rumeurs de circuler, et à ses adversaires de s'organiser. Notamment Tallien, Barras, Barère, Collot d'Herbois, ralliés par Foucher et Carnot. Des hommes corrompus, intrigants, qui n'avaient pas la conscience tranquille et risquaient d'être sur la prochaine liste envoyée à la guillotine. Mais au lieu de frapper le premier, de nommer ses ennemis et de les faire condamner, Robespierre tergiverse, profère de vagues menaces, et remet la suite au lendemain. Cette procrastination lui sera fatale. Dans la nuit même, Paris bruit de rendez-vous clandestins, de complots. Et le 9, alors que l'Incorruptible s'apprête à annoncer « la purge finale », il est empêché de parler, conspué, malmené, arrêté, emprisonné (brièvement), et doit se réfugier à l'Hôtel de Ville. Barras, par un coup de poker, parviendra à s'en emparer, et ce sera la fin pitoyable de Robespierre, lequel tente de se suicider et se loupe, et de son clan.
Passionnant, très documenté, le roman est mené de façon alerte, cinématographique, et la géographie du Paris révolutionnaire, grouillant, parfaitement restituée. Avec l'aide de la 3D, ça ferait un téléfilm épatant.
La chute
Perrin
Tirage: 15 000 ex.
Prix: 19,90 euros ; 288 P
ISBN: 9782262082284