La sidération après les attentats de janvier dernier contre Charlie Hebdo, la jeune policière municipale et l’Hyper Cacher, la gigantesque manifestation parisienne qui a suivi posent de nombreuses questions. Bien sûr, on peut tenter de savoir "qui est Charlie". Mais on peut aussi s’interroger sur l’aveuglement des clercs face à la montée du jihadisme et du Front national.
C’est l’option retenue par Alexandra Laignel-Lavastine. Spécialiste de l’histoire des idées, notamment dans ce qu’on appelait la Mitteleuropa, elle met ses pas dans ceux de Jan Patocka, un auteur qu’elle connaît particulièrement bien, pour cerner ce malaise français.
Ses adresses à l’endroit des intellectuels de gauche parmi lesquels elle se situe feront débat, tout comme sa vision des islamistes. Parmi les jihadistes français, on compte en effet 40 % de convertis, preuve que l’explication ne se situe pas que sur le terrain du religieux. Il faudrait aussi comprendre le silence des chefs d’Etat occidentaux après le massacre de 148 personnes à l’université de Garissa, au Kenya, par un commando islamiste…
Beaucoup de questions traversent cet essai alerte : la liberté d’expression, la responsabilité des politiques et évidemment le curieux somnambulisme des élites face à un phénomène nouveau. Plus proche des positions de Manuel Valls que de celles d’Edwy Plenel ou d’Eric Zemmour qu’elle inclut dans le même dilettantisme de la pensée, entre le politiquement correct et le politiquement abject, Alexandra Laignel-Lavastine tente de saisir la montée de l’obscurantisme religieux et le déclin des idéaux de l’humanisme des Lumières. La paix et les démocraties sont fragiles. C’est ce qui les rend si précieuses. L. L.