Le très discret Arnaud Dudek est un peu le chef de file de cette école littéraire du farfelu, informelle mais intéressante, qui s’est créée chez Alma et dont le succès va croissant. Les vérités provisoires, son cinquième roman (mais le quatrième chez le même éditeur, depuis 2012), en est à nouveau la digne illustration.
C’est l’histoire de Jules Carenti et de sa sœur Céline, que l’on ne verra en fait jamais, parce qu’elle a disparu de chez elle sans plus donner de nouvelles. En dépit de l’enquête menée par le frère, lente et hésitante, elle ne réapparaîtra pas. Le lecteur, que l’auteur n’hésite pas à prendre à témoin (par exemple p. 119), à impliquer dans l’invention même de son histoire, s’en moque un peu, comme de cet homme d’affaires allemand avec qui elle a un temps vécu. Le vrai héros, c’est Jules. Un garçon décrit comme "mignon", frêle, timide, plutôt gentil, qui plaît assez aux filles, mais terriblement menteur. C’est dire, il a même failli être écrivain. "Nul en êtres", il ne fait rien, investit l’appartement de Céline et rêvasse. Le hasard lui permet de faire la connaissance de sa voisine Bérénice. Ils tombent amoureux. Mais elle est sérieuse, bosseuse, fidèle et sait ce qu’elle veut : étudiante Erasmus, elle part s’installer à Prague, puis à Magdebourg, tandis que lui s’enferre pathologiquement dans ses mensonges. Même sa meilleure amie, Jin, se lasse.
Il faudra, au final, un gros tangage dans le couple pour que Jules, enfin, se décide à changer, à exprimer ce qu’il pense, à crier son amour. Halleluyah et happy end.
Jean-Claude Perrier