Le narrateur se veut "un jeune homme à l’esprit moderne". Très porté sur les nouvelles technologies, trouvant "une voiture de course plus belle que la victoire de Samothrace", aspirant, in fine, à un bonheur pépère. C’est donc en toute logique que, étudiant en géographie parisien frappé d’ultimatum par son directeur de thèse, il choisit Berlin pour aller terminer son pensum, une défense et illustration des réseaux sociaux. En plus, il parle allemand.

Abandonnant momentanément Annabella, sa copine, manageuse d’un groupe de rock, il part avec pour seule compagnie Dino, son chat, caractériel et pisseur. Et c’est grâce à l’animal, ayant souillé une fois de plus son lit, qu’il rencontrera dans un lavomatique Dora, une fille plus que bizarre, dont il va petit à petit s’éprendre. "Invivable", pas très sympathique, elle entraîne le héros dans le "vrai Berlin", hors des sentiers battus, là où elle vit. Pendant ce temps, contraint de travailler pour pouvoir déménager, il se fait embaucher dans une start-up de recouvrement de dettes et se vit en "chasseur de primes", joue dans une équipe de basket avec Gabriel, un copain américain de bibliothèque, et se fait des plans sexe minables avec Annabella, par webcam interposée. Quant à sa thèse, elle n’avance guère… Notre ami va-t-il opter pour Dora, Berlin et la grande aventure romantique, ou bien regagner Paris, ramené au bercail par Annabella, terminer, enfin, sa thèse et devenir prof de géographie dans un collège de banlieue ?

On laissera au lecteur le soin de deviner la fin de cette comédie sucrée-salée, où le tout jeune Clément Bénech (23 ans) confirme les qualités littéraires manifestes de son premier roman, L’été slovène (Flammarion, 2013), et s’ébroue dans la littérature comme un bébé labrador dans une rivière. Son style est alerte, enjoué, son esprit gentiment ironique, teinté d’humour potache - voir une photo de lui, p. 119, en train de faire la sieste au pied d’une des pyramides de Gizeh, bien moins belle qu’un smartphone. Bref, le charme Bénech opère. J.-C. P.