21 mars > Histoire France > Florence Buttay

L’histoire est édifiante. Au XVIe siècle, un homme se raconte. Bien mieux, il s’invente comme l’avait fait avant lui Marco Polo ou Jean de Mandeville, qui n’avait jamais quitté Liège. Giorgio del Giglio (v. 1520- v. 1579) a pourtant vraiment voyagé, mais sans doute pas aussi loin qu’il le prétend. Il assure tellement de choses d’ailleurs. Il se dit de Sienne. Il est surtout de nulle part, perdu dans un monde de découvertes. Il va donc, dans deux manuscrits lus à la loupe par Florence Buttay, se construire une identité, de marchand, d’espion capturé par les barbaresques, de chrétien ayant renié sa foi pour embrasser l’islam au service de Soliman le Magnifique.

Le titre peut tromper ceux qui pensaient tomber sur un livre d’aventures. Certes, il y en a, mais il est surtout beaucoup question de religion, de cosmographie, d’érudition, d’analyse, de philologie. Cette spécialiste de la Renaissance, qui a dirigé le Festival de l’histoire de l’art de Fontainebleau, laisse entendre que ce Giorgio l’imposteur pourrait bien être juif. Dans les dernières années de sa vie, il aurait retrouvé sa religion première en considérant l’islam comme une branche hérétique du christianisme, idée reçue assez courante à l’époque. En tout cas, sa prose chaotique témoigne d’une aventure hors normes, même si elle fut beaucoup enjolivée. "Je suis sûr que ceux qui m’entendront et ceux qui me liront seront stupéfaits du chemin que j’ai parcouru." Il est juste un peu dommage que l’ouvrage ne rende pas complètement la mesure de cette folie de soi. L. L.

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