9 janvier > Roman France

Renouant avec sa veine française, que l’on préfère à ses romans « made in LA », Philippe Besson signe ici l’un de ses plus beaux livres avec La maison atlantique où il développe un huis clos à quatre qui s’achève en tragédie.

Bien des années après, le narrateur revit et raconte cet été fatal de ses 18 ans. Ses parents avaient divorcé. Sa mère, deux ans auparavant, est morte, officiellement d’un suicide aux médicaments. Son père, Guillaume, ne s’est jamais vraiment occupé de son fils, si ce n’est en lui fournissant tout le confort matériel. Riche avocat d’affaires, frimeur, infidèle, c’est un « prédateur » et aussi un Don Juan prêt à tout pour parvenir à ses fins.

Aussi, l’idée de passer un mois en tête-à-tête avec son père, dans la maison même où sa mère est morte, n’enchante guère le jeune homme. Il accepte, cependant, parce qu’il n’a rien de mieux à faire, et aussi sans doute par défi. Car le garçon, qui se présente comme un « expert en maladresse », un peu tête-à-claques, en veut à son géniteur, qu’il rend responsable de la mort de sa mère.

Dès le début, ça ne se passe pas très bien. Le garçon a les nerfs à vif, il rompra même avec Agathe, sa petite amie. Il songe à partir n’importe où, retrouver des copains. Lorsque débarque un jeune couple. Raphaël, un architecte de 30 ans, sympa, honnête, un peu distrait. Et sa femme, Cécile, une prof de 29 ans. On devine la suite : Guillaume, tout émoustillé, joue les Amphitryon, et n’aura de cesse qu’il n’ait séduit Cécile. Et y arrive. Raphaël étant confiant et absorbé par son travail, leurs amours coupables se passent dans la discrétion et la sécurité. Mais l’amant se fait bientôt tyran, développant à l’égard du mari trompé une jalousie pathologique. Cécile jongle, hésite. Le fils, lui, vit très mal cette relation, qu’il oublie un temps dans les bras de Jérémy, un jeune gay avec qui il découvre un amour différent. Mais Guillaume apprend l’affaire : il flanque à son fils une gifle mémorable ; erreur fatale.

Tous les personnages et tous les mobiles sont réunis pour que le « vaudeville malsain », le huis clos psychologique, vire à la tragédie la plus passionnelle.

En soixante-dix chapitres, Philippe Besson mène ce roman très « masculin » de main de maître. A rebours du père, le narrateur jeune et Raphaël sont très attachants. Cécile, elle, étant plutôt une victime imprudente. Cette année, Philippe Besson a mis du Sophocle dans son moteur. J.-C. P.

Les dernières
actualités