7 novembre > Essai France

Max Dorra- Photo DR

Max Dorra est un touche- à-tout : psychanalyste, romancier, essayiste, on sent à le lire que l’écriture tient pour lui autant du jeu que de la réflexion. Le titre du présent ouvrage, Lutte des rêves et interprétation des classes, reflète ce double mouvement. Pourtant, c’est bien de psychanalyse qu’il est ici question, et précisément de la méthode de la libre association, au fondement de l’interprétation freudienne du rêve, « victime d’une incompréhension têtue » de la part de la philosophie. L’essai est en fait un plaidoyer : cette association libre est la seule à pouvoir interpréter les rêves, mais aussi à dépasser la « signification » arbitraire et collective pour retrouver le « sens » individuel. C’est l’occasion pour l’auteur de passer d’un discours de la méthode psychanalytique à une réflexion sur ce qui se joue entre le moi et les classes, sociales, sexuelles, culturelles ou sémantiques. Car « derrière la classification se trouve le classement », auquel depuis l’enfance chacun tente de correspondre ou d’échapper. C’est le tour de magie que nous jouent le groupe et notre désir d’en être : nous faire croire que la raison sait mieux que l’affect - et c’est ce tour de magie qu’il nous faut démonter. La force attachée ici au rêve n’est pas loin de celle que lui conféraient les surréalistes : force individuelle, elle peut devenir une véritable matrice révolutionnaire, nous libérant d’une pernicieuse idéologie productiviste. Sous le patronage de Spinoza, l’essai virevolte, lui aussi libre et onirique, passant du magicien Robert-Houdin à quelques vers libres, et de Descartes au dialogue fictif avec un lecteur perplexe. Perplexe, il l’est en effet quelquefois, décontenancé par la rapidité de l’affirmation. Mais qu’importe ici la raison : l’ouvrage laisse rêveur, donc l’auteur a gagné. Fanny Taillandier

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