Julien Blanc-Gras revient au chaud. Après le Groenland (Briser la glace, Paulsen, 2016), qui faisait suite à un voyage au cœur de la grossesse (In utero, Au Diable vauvert, 2015), notre globe-trotteur de 41 ans s’en est allé faire un tour du côté des royaumes des sables, dans les pétromonarchies riveraines du golfe Persique. Dans ce coin peu arpenté par les écrivains voyageurs - même si l’on peut rappeler le récent Ormuz de Jean Rolin -, il est arrivé fidèle à son credo : nouer des liens avec les autochtones pour comprendre comment ils voient le monde. Mais le Qatar où commence le périple résiste. A Doha, la capitale en chantier de ce pays gagné sur le désert, dont le sous-sol abrite la troisième réserve mondiale de gaz, il ne rencontre que des étrangers comme lui. Julien Blanc-Gras n’est pas un grand reporter, et c’est donc en curieux et non en fouineur qu’il voyage, retournant aux Emirats arabes unis qu’il connaissait déjà, à Dubai et Abu Dhabi, achevant son tour à Oman.
Depuis Gringoland en 2005, l’auteur de Touriste et de Paradis (avant liquidation) s’intéresse dans ses récits aux sujets lourds - politique, religion, droits de l’homme, et ici précisément l’islam, la place des femmes, l’esclavage des ouvriers immigrés de la construction, le football business… - sans jamais donner de leçons définitives. Dans le désert réaffirme sa position, distanciée, empathique, critique mine de rien, volontairement optimiste. "Ecrire un livre de voyage, c’est une déclaration d’amour. On égratigne parfois, on ironise, on témoigne des saloperies ou des absurdités dont on est témoin, mais on vante surtout les charmes, on dissèque la beauté, on tente de transmettre des bouquets de sensations."
Véronique Rossignol
