La religion hindoue est à l’image de l’Inde, dont elle constitue le socle : incommensurable, formidablement complexe et si poétique. Elle a inspiré plusieurs épopées fleuves - comme Le Râmâyana de Valmiki, dédié à Râma, avatâra du grand dieu Krishna (avec ses 24 000 shloka ou stances de 32 syllabes), ou Le Mahâbhârata, attribué à Vyâsa (et ses 90 000 shloka), qui conte les exploits de Krishna, justement -, lesquelles figurent parmi les chefs-d’œuvre de la littérature mondiale. Elle a aussi nourri l’art du pays, au moins depuis le Ier siècle avant J.-C., puisque, avant cette date, "aucune image divine de pierre ou de métal n’a été conservée (datable) avec certitude", fait observer Jean Delmas dans la première partie de son ouvrage. L’Inde, selon Malraux est "la seule civilisation au monde bâtie sur des fondements spirituels". Même si, depuis, le pays a accueilli nombre d’autres religions (islam, judaïsme, christianisme, zoroastrisme, sikhisme, jaïnisme…), sans parler du bouddhisme, né en Inde, Bouddha étant considéré dans certains textes comme un avatâra de Vishnou, l’autre grand dieu du panthéon hindou, et si la société indienne a beaucoup évolué, surtout depuis l’indépendance, en 1947, la religion majoritaire, parfois contestée par certaines élites, continue de largement conditionner les rapports humains, sociaux, économiques politiques.
A cause de son foisonnement même, de ses ramifications, l’hindouisme, que Jean-Louis Delmas appelle joliment "un monothéisme à facettes", présupposant que chaque hindou vénère en fait une seule entité divine sous des apparences multiples, demeure parfois hermétique aux étrangers monothéistes. Delmas, écrivain, producteur d’émissions radiophoniques, photographe, collectionneur (notamment de ces sublimes chromolithographies pieuses généreusement reproduites ici), mais surtout amoureux de l’Inde, nous offre aujourd’hui LE livre que l’on attendait sur le panthéon hindou. A la fois érudit et d’une clarté et d’une accessibilité totales, abondamment illustré, et pourvu d’index pédagogiques fort utiles, il procède decrescendo, depuis la trimûrti, la grande triade Brahmâ/Vishnou/Shiva, jusqu’aux "génies, nymphes et autres êtres célestes". Et les déesses n’y sont pas oubliées. J.-C. P.
