« La vie n'a pas l'héroïsme des livres. » Pourtant, tant de plumes ont le courage d'affronter nos démons intérieurs et extérieurs. La pandémie nous a mis à rude épreuve. Elle a surgi du néant pour envahir les moindres recoins de nos existences. Comme chacun de nous, Wajdi Mouawad a été surpris par ce raz-de-marée. Le directeur du Théâtre national de la Colline s'est retrouvé au pied du mur avec la fermeture de son établissement et la suspension de ses projets. « Qu'est-ce qui nous arrive ? En ce premier jour du confinement, faire l'état des lieux relève d'une impossibilité. Peur, tristesse, inquiétude... Chagrin immense et collectif. » Être enfermé n'est guère naturel pour cet oiseau de liberté. Alors il prend vaillamment la plume pour décrire ce flux d'émotions. « Une fois par jour, des mots comme des fenêtres pour fendre la brutalité de cet horizon qui nous enterre. » Il va en extraire des lumières, dépassant de loin de sa propre condition. « Bien que nous soyons dans nos maisons, nous sommes en exil. »
Un sentiment qui le ramène inexorablement vers le Liban de son enfance, écrasé par les bombardements. Déjà, l'enfant voyait dans les mots une forme de magie, qu'il n'a cessé de cultiver depuis, comme metteur en scène. Son journal nous éblouit avec ses belles réflexions sur la vie. « Il existe un parchemin au fond de chacun de nous qui s'appelle fragilité. » Loin de la fuir, il la considère comme un point commun entre tous les humains. Aussi nous invite-t-il à partager « l'art comme un geste guerrier ». Sans oublier de « pleurer les morts, célébrer les vivants ».
Parole tenue. Les nuits d'un confinement, mars-avril 2020
Actes Sud
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 20 € ; 184 p.
ISBN: 9782330152420